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    Tchad – France : la rupture de l’accord de défense, entre passé, présent et perspectives

    Tchad – France : la rupture de l’accord de défense, entre passé, présent et perspectives
    Publié le
    Par
    Wakili Alafé
    Lecture 4 minutes
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    L’annonce faite le jeudi 28 novembre 2024 par le ministre des Affaires étrangères tchadien, Abderaman Koulamallah, de la rupture de l’accord de défense entre le Tchad et la France suscite un intérêt au sein de l’opinion publique ouest-africaine et au-delà, en même temps qu’elle rappelle que c’est une quête et une décision qui ont eu des précurseurs.

    Cette décision, loin d’être une rupture soudaine, n’invite-t-elle pas à analyser les dynamiques historiques et les perspectives qu’elle ouvre pour les relations entre ces deux pays ?

    Une histoire marquée par des remises en question

    La présence militaire française au Tchad a souvent été questionnée depuis les années 1970. Voici quelques jalons marquants :

    • 1975 : Suite au coup d’État ayant renversé François Tombalbaye, le Président Félix Malloum avait demandé le départ des forces françaises.

    • Mai 2022 : La coalition d’opposition Wakit Tama avait organisé des manifestations à N’Djamena pour réclamer la fin de la présence militaire française.

    • Septembre 2023 : Plusieurs voix, dont celle du président du parti Rajet, Ordjei Abderahim Chaha, avaient appelé à la rupture de l’accord de défense.

    Ces épisodes montrent que l’actuelle décision ne résulte pas d’un événement conjoncturel mais s’inscrit dans une volonté tchadienne de redéfinir ses relations avec la France. Comme l’a souligné le ministre Koulamallah, cette démarche s’inscrit dans un cadre réfléchi, où le dialogue reste ouvert pour « explorer de nouvelles formes de partenariat ».

    Une rupture à contre-courant des modèles AES ?

    Contrairement aux ruptures brutales observées dans d’autres pays de l’Alliance des États du Sahel (AES), comme le Niger, le Tchad opte pour une approche concertée et progressive. Le ministre des Affaires étrangères a insisté : « Ce n’est pas une rupture totale comme au Niger ou ailleurs. Le Tchad respectera les modalités prévues par l’accord, y compris le délai de préavis. »

    Cette posture contraste avec les expériences des pays de l’AES où des ruptures non concertées ont dégradé la situation sécuritaire et intensifié les tensions sociales. À titre d’exemple :

    • L’expansion des groupes armés terroristes dans la région des trois frontières (EI et Al-Qaïda) témoigne des limites des solutions impulsives.

    • Les partenariats alternatifs, notamment avec la Russie, ont montré leurs faiblesses, exacerbant les clivages communautaires sans enrayer les menaces terroristes.

    Le Tchad semble s’inspirer de modèles plus progressifs, à l’instar de la Côte d’Ivoire, où la rétrocession graduelle de la base de Port-Bouët et la coopération militaire renforcée (comme l’exercice Touraco en novembre 2024) illustrent une transition maîtrisée.

    Un rééquilibrage des relations bilatérales

    La décision tchadienne s’inscrit dans une dynamique plus large amorcée par la France pour repenser ses partenariats en Afrique. Depuis 2022, sous l’impulsion du Président Emmanuel Macron, une refonte des relations de défense a été initiée, s’appuyant sur :

    • Une consultation élargie : Les autorités et sociétés civiles tchadiennes, gabonaises et ivoiriennes ont été impliquées dans la redéfinition des accords de défense.

    • Une adaptation aux enjeux contemporains : Sécurité, démographie et climat sont au cœur des nouvelles priorités.

    • Une présence militaire transformée : Les bases françaises deviendront des bases partagées avant d’être transférées aux États hôtes.

    Ce rééquilibrage vise à garantir la souveraineté des partenaires tout en répondant à leurs besoins spécifiques à travers des projets structurants et une coopération équitable.

    Entre mémoire et avenir : écouter les aspirations des peuples

    La rupture de l’accord franco-tchadien de défense est également l’écho d’aspirations populaires exprimées de longue date. Dès 1998, le chanteur Alpha Blondy lançait son célèbre appel : « Armée française, allez-vous-en ». Cet appel résonne encore aujourd’hui dans de nombreux pays, où la jeunesse et les sociétés civiles réclament plus de souveraineté et une redéfinition des partenariats historiques.

    Pour le Tchad, cette décision n’est pas une fin, mais un nouveau départ. En choisissant la voie de la concertation et du pragmatisme, N’Djamena ouvre la porte à une coopération renouvelée avec la France, adaptée aux réalités actuelles et aux défis à venir. La Côte d’Ivoire est dans une dynamique sous le président Alassane Ouattara. Considéré comme un allié de la France , le chef de l’État n’est pas insensible aux aspirations de souveraineté liées à la présence de l’armée française en Côte d’Ivoire. Il ne faut pas oublier qu’il a œuvré à mettre fin à l’opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire de façon libre et souveraine.

    Alafé Wakili

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