Considérée à Dakar comme l’une des figures montantes de la politique nationale Sénégalaise, Me Aïssata Tall Sall a ouvert à Afrikipresse.fr les portes de son cabinet, situé à deux pas de l’Assemblée nationale. Député-maire, membre du parti socialiste, cette ‘’dame de fer’’ hausse le ton et met en garde au sein même de sa propre famille politique contre une éventuelle ‘’chaise vide’’ contre Macky Sall, pourtant leader de leur coalition : ‘’Benno Bokk Yakkar’’.
Quel est actuellement l’état des relations entre le Ps, votre famille politique et le parti APR du président Macky Sall ?
Vous savez que le parti socialiste est engagé avec l’APR (l’Alliance pour la république) qui est le parti du président Macky Sall dans une coalition que nous appelons ici, ‘’Benno Bokk Yakkar’’ qui est une expression en Wolof, la langue la plus couramment parlée au Sénégal, qui signifie,’’ Ensemble, pour l’espoir’’, comme pour révéler le défis du Sénégal. Cette coalition n’est pas née n’importe comment, elle est née d’entre les deux tours. Parce qu’en 2012, lorsque les élections présidentielles ont eu lieu au Sénégal, nous tous qui étions dans l’opposition, nous avions un cadre dans lequel nous avions évoqué le souhait d’avoir un seul candidat, contre Abdoulaye Wade pour mobiliser à la fois tous les partis politiques, la société civile,… bref, toutes les forces vives du pays pour s’opposer à Wade et arriver à le terrasser…
Lire aussi >> Côte d’Ivoire- Appel à une réduction des frais de mission à l’étranger des ministres
Deux ans après, pensez-vous que cette alliance tient toujours la route ?
Cette alliance n’a pas été une alliance de circonstance même si certains pensent qu’elle est fragile et qu’elle va se défaire non ! Nous travaillons pour le redressement politique du Sénégal, cela est plus solide, plus important. Même si quelques observateurs pensent que cette alliance bat de l’aille.
Justement, vos deux partis, pourtant alliés au sein de la majorité présidentielle ont mis au grand jour leur divergence politique lors du dernier scrutin municipale qui vous opposait au candidat du parti de Macky Sall. Une affaire qui s’est d’ailleurs terminée devant les tribunaux ?
Je vous explique. Moi, je suis membre de la coalition ‘’Benno Bokk Yakkar’’…
Tout comme votre adversaire !
Oui ! Et j’étais le candidat naturel de cette coalition parce que je sortais de la mairie de Podor avec un mandat tout à fait honorable vu les résultats. Maintenant, il se trouve que le ministre de l’Intérieur, membre du parti de Macky Sall est le responsable politique de la région de Podor et moi, je suis le responsable politique régional et même départemental du Parti socialiste chez moi. Lui, il a pensé, pour des raisons qui lui sont propres que cette coalition ne devait pas être reconduite et que le parti de Macky Sall, parce que Podor est une ville touristique et tout, ait son propre candidat, comme cela se fait dans d’autres localités la seule différence qu’à Podor, c’est le ministre de l’Intérieur qui a certifié cette attitude. Et moi, j’ai trouvé ça comme une attitude de défiance vis-à-vis de la coalition à laquelle tous les deux nous appartenons et la lutte a été âpre, vous imaginez.
Lire aussi >> Côte d’Ivoire : Une mission onusienne pour évaluer des besoins en matière électorale
Et au sortir de cette lutte, j’ai gagné ces élections, au soir du 29 juin 2014. Mais l’autre parti n’a pas accepté, il a introduit un recours en justice et ma victoire électorale s’est transformée en aventure judiciaire. Ils sont partis à Saint Louis et le juge de cette ville a donné raison à mon adversaire et j’ai porté l’affaire à Dakar et le juge de Dakar m’a rétabli dans mes droits. De toutes les façons, notre victoire était incontestable. Justement vous avez raison parce qu’après l’épisode de Podor, on peut donc se demander à quoi sert cette coalition ? (…) Malheureusement, cette coalition n’est pas structurée de bas en haut. Car, pour l’élection du président de la République, cette coalition a marché à plein régime. Elle a également marché quand il s’est assis d’envoyer des députés à l’Assemblée nationale puisque je suis moi-même député mais dès qu’il s’est agit des élections locales, cette coalition s‘est fracassée pour des ambitions personnelles.
Selon l’opinion nationale sénégalaise confirmée par des correspondants de la presse étrangère basée à Dakar, le maire de Dakar, Khalifa Sall, qui est également du PS, et vous, vous êtes les deux étoiles montantes de la politique sénégalaise. Qu’en pensez-vous ?
Je pense qu’il faut faire la politique posée sur deux points essentiels, le premier, c’est la conviction. On ne peut pas apporter un engagement politique sans avoir une visibilité en politique. Le maire de Dakar et moi, tenons surtout à notre identité socialiste c’est la raison pour laquelle lorsque Abdoulaye Wade, pro-libéral était au pouvoir, nous avons refusé malgré toutes les promesses qui nous avaient été faites, de changer de camp. Nous et d’autres d’ailleurs. L’autre point sur lequel on doit s’appuyer, c’est l’humilité et la modestie. Ce n’est pas parce qu’on la force de résister devant ces transhumances politiques qu’on va dire qu’on est l’alpha et l’oméga…
Aujourd’hui, au sein de votre parti, il y a sujet qui fait débat. C’est la désignation d’un candidat PS pour les présidentielles de 2017. Une initiative que ne semblent pas épouser les dirigeants du PS. Quel est votre point de vue sur la question ?
Pour moi, il est tranché. Et Dieu merci, c’est la majorité écrasante qui pense que nous devions avoir un candidat. Nous sommes un parti historique qui a aujourd’hui 66 ans. En Afrique sub-saharienne, en dehors de l’ANC de Nelson Mandela, il n’y a pas de parti plus vieux et plus ancien que le parti socialiste sénégalais. Lorsque Senghor a créé ce parti, il l’a créé sur de la revendication, sur l’opposition…avec son identité, et sa volonté d’aller au pouvoir. Si aujourd’hui, pour quelles que raisons que ce soit, nous estimons, nous, que nous ne devons pas avoir de candidat, mais c’est trahir ceux qui ont été à la base de la création, c’est trahir les pères fondateurs, c’est trahir Léopold Sédar Senghor.
Et que feriez-vous seriez-vous candidate avec ou sans l’accord de votre parti ?
J’imagine difficilement que ça soit le ca mais si c’était le cas un nombre de camarades et moi ne serons plus dans le parti de Senghor. Dans tous les cas, l’échéance est encore longue et nous ne sommes que dans des hypothèses.
Claude D, à Dakar