Depuis plusieurs années, la mode africaine connaît une popularité croissante sur la scène internationale. Cette année, la dynamique semble s’amplifier.
Naviguant entre traditionnel et modernité, les designers africains gagnent aujourd’hui en notoriété. D’abord, sur le continent, avec des personnalités politiques s’habillant publiquement de manière « tradi-moderne » pour la première fois, comme le président et Premier ministre sénégalais, l’année passée. Pour le créateur Xalil Cissé, adopter ce style permet aussi de plaire à la jeunesse régionale. Le rôle des personnalités dans la promotion de la mode est ainsi clé, contribuant à sa diffusion à travers le monde, notamment par les réseaux sociaux.
La nouvelle génération de designers s’est d’ores et déjà distingué en 2024, par des noms comme celui d’Imane Ayissi en Haute Couture, ou celui d’Elie Kuame, organisateur de l’Abidjan Fashion Week en octobre. Les participations des représentants et pourvoyeurs de la mode africaine sont attendues cette année aux Fashion Weeks de Londres, Paris ou encore New York. À l’étranger, des événements y sont désormais entièrement dédiés, comme l’Africa Fashion Up au mois de janvier en France, consacré au contemporain depuis 2021. Pour espérer voir son nom s’élever et faire mousser ses créations, participer est alors une occasion à ne pas manquer.
Contre les idées reçues : une Afrique au-delà des motifs
Autre que le bien connu wax, en Occident, divers motifs séduisent le milieu élitiste de la mode. L’imprimé bogolan du Mali est issu de techniques ancestrales, réalisé à base de plantes et d’argile. Des créateurs comme Awa Meité l’associent à des coupes modernes unisexes. L’imprimé kente du Ghana est un textile d’origine royale, autrefois réservé aux rois Ashantis. Le sweshwe, tissu en coton à motifs géométriques, originaire d’Afrique du Sud, était autrefois utilisé pour les cérémonies des communautés Xhosa et Sotho.
Intarissable source d’inspiration dans le milieu, les motifs africains, aux couleurs vibrantes, font l’objet d’un attrait universel depuis longtemps. En 2025, c’est le Faso Danfani, « pagne tissé de la patrie », tissé à la main et originaire de la région de Mossi, qui connaît un gain de popularité à l’étranger. La tendance de la durabilité et de l’éthique s’étant emparé du secteur, les matières premières et leurs utilisations artisanales séduisent de plus en plus un grand public international.
Connue du grand public par ces designs uniques en leur genre, la mode africaine ne s’arrête pourtant pas là. Les accessoires connaissent, eux aussi, un certain succès. Bijoux en perles massaï du Kenya, colliers touaregs en argent et sacs raphia camerounais sont tout autant d’exemples frappants. Aujourd’hui, le tradi-moderne se base sur des coupes vestimentaires revisitées. Le boubou est ainsi repensé en version cintrée ou asymétrique. La veste saharienne, elle, est réinterprétée en tenue de ville contemporaine.
Malgré cet engouement, le défi des têtes pensantes de la mode africaine de demain reste de naviguer dans un environnement concurrentiel, où tendances et phénomènes sont trop souvent éphémères. À cela, s’ajoute l’accès aux ressources, aux financements et aux réseaux de distribution du milieu, particulièrement dur à atteindre pour les petits créateurs issus de régions isolées. Pour palier à ces difficultés, des initiatives comme la L.A.S.M.E. (L’Afrique s’habille en Mode Éthique) offrent des plateformes pour propulser la mode africaine sur la scène mondiale.
Constantine Ndoko