Des informations crédibles font état de pourparlers entre le gouvernement zambien et la Chine à propos de la cession à la Chine de la société nationale d’électricité ZESCO. Cette cession fait suite à l’incapacité de la Zambie à rembourser sa dette à la Chine. C’était prévisible puisque les Chinois contrôlent déjà la société de radio télévision du pays (ZNBC). L’aéroport principal de Lusaka pourrait également être leur prochaine cible. La Zambie est réellement en difficulté. Les autres bénéficiaires africains des prêts chinois se préparent au même sort si jamais ils ne peuvent pas respecter leurs échéances de remboursement.
L’accélération de la dette : un jeu dangereux
La Chine est intelligente et possède une vraie politique en Afrique. Elle a vite compris les besoins de développement du continent africain et utilise une stratégie efficace pour garder l’avenir économique de l’Afrique sous sa tutelle.
L’Afrique possède ce dont la Chine a besoin pour propulser davantage son économie, en particulier le pétrole brut et le cuivre. La meilleure façon d’en assurer l’abondance pour l’avenir est de faire en sorte que les pays producteurs lui soient redevables, ce qu’elle a très bien fait jusqu’à présent. Le jeu est simple : donner discrètement des prêts stupéfiants aux avides dirigeants africains et garder les détails du remboursement à l’abri des regards indiscrets du peuple. Ainsi, si les débiteurs ne sont pas en mesure de rembourser leurs dettes, la Chine saisit leurs hypothèques, qui, comme le monde le voit maintenant, sont constituées principalement d’actifs nationaux. Mais cela ne rend pas complètement compte de la gravité de la situation dans laquelle l’Afrique se trouve.
Les rapports montrent qu’un nombre substantiel de pays africains a contracté des prêts chinois depuis 2000, totalisant 124 milliards de dollars en 2016. La dette ne cesse d’augmenter, et ainsi, l’Afrique n’est que la victime de sa propre stupidé alors même que le monde entier l’avait mise en garde contre l’objectif final de la Chine. Le mois dernier, le Fonds monétaire international (FMI) et les États-Unis (US) ont encore mis en garde les dirigeants africains du risque qui entoure les prêts chinois au cœur de l’Initiative de la « Nouvelle route de la soie » lancée par le Président Xi Jinping en 2013. Enserrés dans leur cupidité, les dirigeants africains ont totalement négligé de lire les clauses des contrats de prêt avant de les signer.
L’avidité des pays d’Afrique
Presque toutes les grandes économies d’Afrique subsaharienne sont aujourd’hui massivement redevables à la Chine. Ce qui est encore pire, c’est que la plupart d’entre elles font face à de médiocres perspectives économiques les prochaines années et qu’elles auront probablement du mal à rembourser leurs dettes. Par exemple, environ 72% des dettes bilatérales du Kenya, soit 50 milliards de dollars, sont dues à la Chine, alors que le pays demande une extension supplémentaire de 3,8 milliards de dollars. Aussi, le Nigéria a récemment accumulé 5 milliards de dollars de prêts de la Chine, et l’Angola doit environ 21,2 milliards de dollars avec une demande de prêt supplémentaire de 4,4 milliards de dollars. Quant à l’Afrique du Sud, elle doit bientôt recevoir 14,5 milliards de dollars d’investissements chinois et un autre prêt de 2,5 milliards de dollars pour ESKOM, sa compagnie nationale d’électricité. Des économies plus faibles comme la République démocratique du Congo, le Soudan et l’Éthiopie ont également contracté une dette importante auprès de la Chine.
Le pire est que d’évidence, la majorité de ces pays africains ne pourra pas atteindre les objectifs pour lesquels ces prêts ont été contractés, principalement en raison de la corruption et de la piètre performance économique. Comment les pays débiteurs parviendront-ils à rembourser la Chine sans se retrouver dans la même situation de la Zambie ? La question n’a pas encore été résolue. Les pays défaillants n’ont aucun espoir d’obtenir des aides internationales comme celle du FMI. Avec l’Initiative multilatérale d’allégement de la dette, plus de 100 milliards de dollars de dette ont déjà été annulés pour 30 pays africains. Dans ce contexte, les États-Unis ont exhorté le FMI à ne renflouer aucun pays débiteur de la Chine.
Quelle alternative à l’endettement ?
Maintenant que le continent est pris au piège de la dette chinoise, les dirigeants africains n’ont d’autre choix que d’écouter les conseils sur l’amélioration de la gouvernance financière et l’élimination de la corruption. L’Union africaine (UA) avait décrié en 2014 que la corruption coûtait 184 milliards de dollars au continent chaque année. Les chiffres ont plus de 3 ans, ce qui, laisse présager d’une réalité encore plus sombre aujourd’hui. Si les pays africains arrivaient à colmater toutes les fuites, ils pourraient générer suffisamment de fonds pour financer une grande partie de leurs besoins de développement.
Par ailleurs, les attentes excessives placées sur les épaules des gouvernements en matière de création d’emplois, d’infrastructures, d’éducation et d’autres besoins, incitent les Etats à l’endettement. Il est évident que les gouvernements ne peuvent pas fournir tout ce qui est nécessaire pour faire prospérer une économie. En fait, plus cette croyance est forte, plus les dysfonctionnements économiques sont nombreux. Par exemple, le transport et la production d’électricité, qui représentent la plupart des prêts chinois à l’Afrique, peuvent être efficacement fournis par des investisseurs privés. Les télécommunications qui résolvent de nombreux problèmes sur le continent sont essentiellement gérées par le secteur privé. La privatisation fonctionnera pour d’autres secteurs cruciaux si les Etats s’attèlent à créer un véritable environnement favorable à des vraies privatisations protégées des manœuvres de copinage qui faussent les règles du jeu.
La Chine a fait connaître ses intentions ; elle veut dominer l’économie mondiale. Ceci est suffisamment clair pour qu’un analyste sérieux puisse le réaliser. Elle connaît les énormes potentialités de l’Afrique et s’efforcera à les utiliser pour mener à bien sa mission, comme l’a fait l’Europe avec le colonialisme.
Ibrahim Anoba, analyste pour Africanliberty.
Article publié en collaboration avec Libre Afrique