Il y’a quelques jours, la Côte d’Ivoire a célébré la Journée de l’albinisme. Dans cet entretien accordé au quotidien ivoirien L’Intelligent d’Abidjan, Méité Lassina, albinos, met en garde contre les préjugés sur la couleur de sa peau.
Pensez-vous qu’une journée en l’honneur des albinos aura un impact social sur l’amélioration de votre vie ?
Il n’y aura pas d’impact immédiat. Par contre on peut s’améliorer. J’ai 25 ans et je suis imprimeur. Il ne faut pas qu’on nous juge par la couleur de la peau. Nous sommes comme tous les hommes. Pour les complexés , l’albinisme est un handicap.
Vous êtes albinos. Comment vous vous trouvez avec cette couleur de la peau : ni métis, ni blanc ?
Chacun doit accepter ce que Dieu lui a donné. Je suis bien dans ma peau. Qu’on nous considère comme tout le monde. Nous sommes intelligents, et capables de tout.
Ceux qui ne sont pas albinos doutent de vos capacités intellectuelles ou professionnelles , et ont même peur de l’albinos.
C’est tout simplement un complexe. Au Mali, il y a un albinos célèbre : le chanteur Salif Kéita. Il est riche. Et quand il donne de l’argent, personne ne refuse. Quand il organise un gala, la salle est pleine à Abidjan, Bamako comme à Paris.
Méité Lassina n’est pas à l’abri de plusieurs maladies. Comment gérez-vous cette menace ?
C’est une vérité. L’entretien de notre peau coûte chère. Les pommades vont de 5000 à 20000 FCFA. Un moment, c’est le chanteur malien Salif Kéita, lui-même albinos qui nous envoyait des médicaments par le biais des ONG. Mais celles-ci les revendaient.
Avez-vous fait des études ?
Oui, jusqu’en classe 6ième. Et cette année scolaire a coïncidé avec la mort de mon père. Sans véritable moyens j’ai jeté l’éponge.
Etes-vous resté comme ça ?
Très jeune , je ne me suis pas laissé faire : j’ai surveillé les toilettes publiques. J’ai vendu des pièces détachées de voitures, avant d’atterrir dans une papeterie.
Etes-vous le seul albinos dans votre famille ?
Nous sommes quatre enfants : deux filles, deux garçons. Les deux garçons sont albinos. Mon grand frère et moi.
Où est votre grand frère ?
Nous vivons à Yopougon, où je suis né il y a 25 ans. Mon grand-frère est étudiant en comptabilité et compose le BTS cette année.
Méité Lassina êtes-vous heureux aujourd’hui ?
Très vite, je me suis pris en charge. Et comme vous constatez, j’ai fait plusieurs métiers. Aujourd’hui, je suis imprimeur et je réside à Yopougon Saguidiba.
Ben Ismaël / L’intelligent d’Abidjan