En 2008, Alafé Wakili échoue à être président de l’Union nationale des journalistes de Côte d’Ivoire (Unjci). Il passe même 45 jours en prison à la maison d’arrêt et correction d’Abidjan. Le journaliste et patron de presse en parle dans son livre, Notre Histoire avec Laurent Gbagbo, paru en 2013, à Paris aux Éditions L’Harmattan.
Dans son livre « Notre histoire avec Laurent Gbagbo », Alafé Wakili a raconté comment il a échoué à devenir président de l’Unjci en 2008. Nous publions ci-dessous des extraits relatifs à cet épisode, qui s’est déroulé il y’a douze ans maintenant. Une partie de l’histoire avait été déjà publié en 2017.
D’autres extraits de Notre Histoire avec Laurent Gbagbo
Concernant la présidence de l’UNJCI je ne voulais pas attendre l’élection présidentielle à venir. Nous étions en 2008. La fin du mandat du président en exercice Amos Beonaho se profilait à l’horizon, tandis que rien n’indiquait l’imminence de l’élection présidentielle post Accord de Ouagadougou. J’étais prêt et tout de suite, pour le combat, pour la bataille.
Quelques années avant, alors que nous étions en campagne pour Amos Beonaho, soit déjà en 2003, des amis étaient venus me voir pour me demander pourquoi je n’étais pas moi-même candidat. Je leur ai expliqué que je n’étais pas prêt ; qu’il fallait se préparer pour être président de l’UNJCI. Et qu’à cette date, je n’étais pas aussi prêt et aussi préparé qu’Amos Beonaho.
Lorsque la fin du second mandat d’Amos Beonaho approche, je manifeste d’abord une indifférence, un désintérêt pour l’association et ses activités. Approché par des membres du Conseil exécutif, je décline même toute intention de candidature. Il s’agissait plus pour moi, de refuser d’assumer le mandat d’Amos Beonaho, que d’un manque d’ambition véritable. Par ailleurs, j’ai toujours eu une attitude de détachement sur la question en me disant qu’on peut réussir sa vie, sans être Président de l’UNJCI.
Des proches décisifs
Il a fallu quatre personnes autour de moi pour aiguiller et réveiller cette ambition qui dormait en moi. C’étaient Moussa Traoré, élu près de cinq années plus tard Président de l’UNJCI, Patrice Pohé, membre du CNP, président de la CNDPCI, Touré Youssouf DP de l’Intelligent d’Abidjan , ami de 20 ans depuis le département de philosophie de l’Université d’Abidjan et Touré Joël mon confident et assistant, qui sauront chacun à son niveau fouetter mon orgueil : «Tu as de l’envergure et l’Unjci aura besoin de cette envergure. Si tu renonces, ils diront que tu as eu peur, et que ce qu’ils disent en coulisses, est vrai, à savoir que tu as peur parce que tu ne serais pas ivoirien. Il faut que tu y ailles et il faut qu’on gagne. Ça va aider les journalistes, car tu as un programme très ambitieux».
Voici le discours que les miens me tenaient. Cela a suffi pour vaincre mes réticences, et me mettre en situation de combat et de prise de risque. Les propos de mes lieutenants plantaient déjà le décor de cette bataille qui sera aux couleurs ivoiritaires et identitaires. Une bataille pour laquelle, je passerai 45 jours en prison, à la Maison d’Arrêt et de Correction d’Abidjan.
L’avertissement de Hamed Bakayoko et les réticences de Jacques Anouma
À dire vrai, j’ai fait fort durant la précampagne. Tout indiquait que j’avais le profil et les moyens pour gagner. Papa me soutenait à fond. Au cours de la précampagne j’avais rencontré Paul Dokui, Blé Goudé, j’avais parlé à Désiré Tagro via Adama Bictogo. J’avais informé Hamed Bakayoko. À l’époque membre du Gouvernement, au titre de Ministre des NTICS, il m’avait dit mot pour mot ceci : «C’est sûr que tu peux gagner, que tu vas même gagner, mais je ne sens pas l’affaire. J’ai l’impression que les gens vont t’emmerder. Tu fais peur, on te trouve insaisissable et incontrôlable. Tu risques d’avoir des problèmes. Je ne pense pas qu’on te laissera aller jusqu’au bout. Alors sois vigilant !» Qui était ce ‘‘on ; dont il parlait. Le Ministre des NTICS ne m’en dira pas plus.
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Serein et sûr de moi, je n’accorderai pas trop d’importance au travail de ces ‘‘on’’, ces sorciers de jours comme de nuit. Quelques semaines avant que tout se gâte, Jacques Anouma dont je sollicite le soutien me demande si le jeu en vaut vraiment la chandelle.
Ai-je vraiment besoin de l’UNJCI pour être visible, me demande-t-il ? Sans doute avait-il entendu des réflexions négatives sur ma candidature et sur mes ambitions. Président de la FIF et Directeur Financier de la Présidence, Jacques Anouma a l’avantage d’écouter ce que la rue ne peut entendre.
Ce sachant encourage plutôt l’accord avec feu Criwa Zéli, qui faisait de moi une sorte de Président du conseil d’administration exécutif avec des pouvoirs renforcés. Cet accord permettait d’aller en alliance au congrès, pour modifier les textes.
Les déboires malgré les concessions
Pourtant cette concession inattendue et surprenante pour mes partisans et qui devait rassurer les plus ivoiritaires des gens intéressés par la campagne, ne me mettra pourtant pas à l’abri de la machine judiciaire du régime.
De son côté Ibrahim Sy Savané , alors ministre , ne manquait pas de faire savoir discrètement à ses interlocuteurs que j’ai le meilleur profil parmi les candidats éventuels. Alors qu’il a de bons rapports avec Criwa Zéli, et que je suis sensé l’avoir lâché en partant du ministère en même temps que Mme Studer au moment où il avait été nommé, la position de Sy Savané sur ma candidature a intrigué dans certains milieux.
C’est dans cette atmosphère que je baigne au retour de mon voyage aux USA, au cours duquel j’ai participé aux conventions américaines des partis républicaine et démocrate. J’étais parmi les témoins de l’investiture très médiatique et historique du candidat Obama, à Denver, dans le Colorado, prélude à sa victoire plus tard. De Denver, j’anime une conférence téléphonique retentissante avec mon staff de campagne en réunion dans un hôtel à Abidjan.
Dès mon retour, je multiplie les consultations et rencontre les membres du Conseil exécutif de l’Unjci. Presque tous, même les partisans de Criwa, hormis Russel Lohoré, me donnent leur soutien de principe. J’ai ensuite deux séances de travail avec Criwa Zéli en tête-à-tête. Chaque fois, il est prêt à renoncer, mais propose de réfléchir encore. Quand on se retrouve plus tard, les données changent. Il ne veut plus se retirer en ma faveur, il me demande plutôt de lui céder la place pour être son premier vice président. Je lui propose la création en sa faveur du poste de Directeur général de l’UNJCI sous le modèle de DG de la FIF, avec des pouvoirs renforcés dans le cadre de la modification des statuts et règlements intérieurs de l’UNJCI.
Excédé par les allusions répétées à ses origines et à sa nationalité, il renonce
Une rencontre ultime et cruciale du Conseil exécutif de l’Unjci a lieu dans un restaurant asiatique à la rue des Jardins aux 2 Plateaux pour auditionner les deux candidats en pôle position. Ma candidature avait fini par acquérir une légitimité au sein du conseil sortant. Lors de l’audition par Amos Beonaho, Mama Camara, Sali Ouattara, Laurence Sautier, j’explique ma vision, mes ambitions.
Les principales préoccupations du comité d’arbitrage tournent autour de ma nationalité. Là, pour la première fois, je prends conscience de ce que la menace est sérieuse. Les journaux pouvaient en parler. Laurent Tapé Koulou pouvait faire sa guerre contre moi. Mais que des gens qui me connaissent depuis plus de dix ans, que des gens avec qui je travaille depuis 6 ans en qualité de membre du Conseil exécutif et 2ème vice président, paniquent, s’inquiètent et expriment des préoccupations de cette nature m’intrigue.
La bonne foi et l’amitié de Amos Béonaho
Amos Beonaho explique et se justifie : « Tu es un frère, pour moi tu es ivoirien mais tu ne peux imaginer le nombre de coup de fil que j’ai reçus ainsi que les pressions me déconseillant de donner l’UNJCI à un étranger. Je suis dépassé par ce qui se passe, je ne comprends pas, alors que depuis six ans tu es vice-président et tu es patron de presse». Cette précision me donne un coup de froid. À la fin des échanges, je cède presque à la surprise et au grand soulagement des membres du comité de conciliation : «Bon si c’est une affaire comme ça, je vais laisser Criwa être candidat, mais je souhaite que les statuts soient modifiés pour permettre au Conseil d’Administration dont je vais briguer la présidence d’entreprendre des activités au nom de l’UNJCI».
La proposition avait été soufflée. Je l’avais refusée au départ, mais avec toute la pression qui s’annonçait, j’accepte pour mettre en avant Criwa Zéli, originaire de Gagnoa, à l’ivoirité si peu discutable que personne n’avait à lui poser les questions que l’on me posait.
Mes partisans sont en colère. Ils sont déroutés et mécontents, même si après une séance d’explication tendue et orageuse, Moussa Traoré , Patrice Pohé, Junior Dekassan, Joël Touré, Touré Youssouf, Claude Dassé finissent par me renouveler leur confiance et promettent de me suivre jusqu’au bout.
Toutefois la machine du pouvoir et les AIE (Appareil Idéologiques de l’Etat) qui s’étaient déjà mis en marche ne pouvaient plus être arrêtés. En dépit de mon accord avec Criwa Zéli, les hommes et les femmes qui avaient décidé de me faire la peau n’ont pas reculé et sont allés jusqu’au bout de leur action funeste.
Police, gendarmerie etc
Quand les convocations avaient commencé à la police, je n’en avais pas soufflé mot à Papa (*). Pour moi, c’était une petite affaire. C’était une action de quelques jaloux, qui ne pouvait pas prospérer. J ‘ai estimé qu’il n’était pas encore nécessaire d’en parler à Adama Bictogo pour qu’il parle au ministre Désiré Tagro. À la police judiciaire, je suis convoqué. L’audition est longue et compliquée.
Je sors libre avec la promesse de me tenir disponible pour la suite de l’enquête. Et avec la promesse d’aider les enquêteurs à aller à Agboville mon lieu de naissance. Cependant je me désiste, estimant que la police devait avoir les moyens de sa politique, pour mener une enquête indépendante, sans ma participation. L’affaire étant restée sans suite à la police criminelle, Laurent Tapé Koulou porte une autre plainte à la gendarmerie, pour les mêmes motifs de fraude sur la nationalité. Je rentre chez moi et je gère tranquille l’affaire sans chercher à alerter outre mesure quiconque en dehors de mon avocat.
Laurent Tapé Koulou ne lâche rien
Mes détracteurs et adversaires ne baissent pas les bras. Dans la presse Laurent Tapé Koulou déplore avec force le fait que je paraisse intouchable, se demande qui me protège, et empêche que la Police m’arrête. Il s’étonne que je ne sois pas encore à la MACA, en se demandant si je suis au-dessus des lois, alors que je suis un faussaire, un fraudeur de la nationalité ivoirienne. Tout ça pour moi !
En ce moment là, les comploteurs racontent que je dispose d’au moins un demi-milliard de FCFA, que j’aurais reçus de la part du RDR pour être président de l’Unjci. L’affaire s’emballe, la République est alertée. Laurent Gbagbo est saisi du dossier par le bais d’Alcide Djédjé et Kadet Bertin. En ce moment là, Papa se rend compte d’un oubli fâcheux dans toutes les démarches entreprises pour ma candidature : à aucun moment, il n’a abordé le sujet ni avec Laurent Gbagbo, ni avec Simone Gbagbo. Il n’a pas jugé cela nécessaire et moi je n’en ai pas éprouvé le besoin. La seule chose que j’ai faite a été d’en parler à Nady Bamba, qui m’a assuré de son soutien. Pour moi cela était suffisant. Mais en a-t-elle parlé à qui de droit ?
Négligence fatale
Cette tentative de négliger Laurent Gbagbo, me sera fatale, même si cela avait été voulu par moi : c’était le prix de l’indépendance. Parler de ma candidature à Laurent Gbagbo, la lui faire accepter et endosser, c’était impliquer le chef de l’Etat dans une affaire de journalistes. De mon point, cela n’était pas nécessaire. Pourtant une telle initiative aurait eu le mérite de me faire savoir si le Président de la République, avait un candidat préféré comme pour l’université avec Aké Mgbo. S’il n’avait pas de candidat, j’aurais pu obtenir son soutien moral et même financier. Si cette démarche avait été effectuée, elle aurait permis, même en cas de reculade , de bénéficier de la protection et de la compréhension nécessaires, pour éviter d’arriver au stade de l’humiliation qui a été la mienne lors de mon arrestation et de mon procès.
Libéré par Gbagbo pour être candidat ?
Malgré tous les témoignages de l’implication personnelle et directe avérée de Laurent Gbagbo dans ma mésaventure, le fait qu’il ait accepté ultérieurement ma demande de grâce a permis à l’Ambassadeur Aboubakar Koné de confier ceci à mon sujet à une connaissance quand je fus gracié : «Dis lui de ne pas renoncer à ses ambitions ; c’est pour lui permettre d’être candidat que le président l’a gracié. Dis lui de foncer». Cependant je n’avais plus le cœur à me battre. Je n’en avais plus la force. Tant il me revenait encore à l’esprit les démarches entreprises par certains amis apparents auprès de Papa pour le dissuader d’intervenir auprès de Laurent Gbagbo.
Alors même que j’étais encore à la DST feu Désiré Tagro, qui, après avoir défendu au départ ma cause, avait fini par se rallier à ceux qui voulaient ma tête, avait interpelé Papa : « Grand frère, le président me demande de te dire de laisser tomber cette affaire, c’est bon pour nous, il sait ce qu’il fait. Ne t’inquiète pas et ce n’est pas la peine d’aller le voir pour parler d’Alafé».
Simone Gbagbo donne sa version
Papa savait que Désiré Tagro ne racontait pas n’importe quoi. Toutefois il décide de rencontrer Simonne Gbagbo, qu’il soupçonnait d’être à l’origine de mes déboires parce qu’il avait été instigateur d’une rencontre entre elle et moi.
Quand il a expliqué que tout ce qui me vise le vise, et que si on me fait du mal, c’est à lui qu’on fait du mal ; la première dame apparemment sincère sur le coup, mais impuissante lui a répondu : «Frère cette affaire ne dépend pas de moi, va voir ton frère». En sortant de l’entretien avec Simone Gbagbo, Papa croise Laurent Gbagbo. Comme toujours quand il le voit en public, le président est chaleureux. Cette chaleur et cette bonne humeur habituelles désarment Papa qui refuse de tout brouiller, et d’insulter l’avenir. Il n’ose pas aborder mon cas alors que je suis à la DST, et bientôt à la MACA. Les défaites d’aujourd’hui préparent les victoires de demain. Alors que je suis détenu à la DST, Papa tente de me voir en vain. Papa se sent humilié, il se sent impuissant.
Dans le bureau de Désiré Tagro
Arrêté quelques heures plutôt dans le bureau de Désiré Tagro, je me souviens alors de l’interpellation du ministre ce Lundi là dès que je suis entré dans son bureau : « Mais Alafé, tu veux me créer des problèmes. On devait t’arrêter le Vendredi, et j’ai dit non. Le président qui suivait le dossier a été informé. Il m’a cherché tout le week end. Et quand il m’a eu, c’était pour me demander quel deal il y’a entre toi et moi. On lui avait dit que tu t’apprêtais à fuir le pays, et il m’a menacé de sanctions si on ne te retrouvait pas».
Le ministre de l’Intérieur me rassure ensuite que tout va bien se passer. Puis il appelle le commissaire Goulehi patron des Renseignements Généraux qui attendait dans le couloir. Désiré Tagro lui ordonne de m’accompagner pour signer mon procès verbal et de l’appeler pour instructions.
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Quand je sors du bureau du ministre, les données changent, on m’interdit de prendre ma voiture et on me coince dans une Peugeot 206 banalisée. Je suis assis derrière, au milieu de deux agents, tandis que le Directeur des Renseignements Généraux est assis devant avec un chauffeur. Nous sommes cinq dans le petit véhicule. Mon chauffeur qui est un policier et fait office de garde de corps, panique. Je tente de joindre en vain Papa pour l’informer. Papa avait commencé à suivre de près l’affaire depuis que le dossier avait quitté la police judiciaire pour être confiée à la Direction des Renseignements généraux (DRG), où j’ai eu affaire à un commissaire originaire de la Marahoué, qui semblait tellement me détester, dans son empressement et le plaisir éprouvé à exécuter sans état d’âme des instructions expresses.
Un commissaire droit dans ses bottes
C’est lui qui est parti à Agboville, faire l’enquête en mettant mes parents dans la terreur et dans une angoisse profonde. Il était présent au procès et n’a pas caché sa joie, à l’énoncé du verdict me condamnant. Puisque la police judiciaire semblait manifester peu d’enthousiasme à me mettre au trou, la DRG le vendredi 1er Novembre 2008 a hérité du dossier sous le contrôle du Parquet d’Abidjan. Durant le week end, ordre avait été donné de m’arrêter, et le ministre Tagro s’y était opposé. Alors que j’étais dans les locaux de la DRG, la rumeur de mon arrestation faisait le tour de la ville et de nombreux coups de fil sont parvenus en ces lieux. Que de pressions !
La veille de mon arrestation Sidi Kagniassi m ‘appelle par rapport aux rumeurs ayant couru. Il me prévient à demi mot que je ne suis pas au bout de mes peines, et me demande d’être fort car la machine répressive ne lâcherait pas prise.
Piège pour une attestation
Le Lundi 03 Novembre 2008, la Police me cherche pour aller signer ma déposition, mais je n’ai pas envie d’aller dans la gueule du loup. Je propose que les policiers se débrouillent pour me trouver et me prendre en ville. J’avais fermé mes portables. C’est Papa que j’appelais de temps en temps, qui m’apprend que le ministre Désiré Tagro l’avait eu au téléphone et lui avait demandé de m’inviter à venir signer ma déposition ; qu’ensuite rien ne me serait fait et que je pourrais rentrer à la maison. Le ministre propose même que Papa m’accompagne pour me rassurer en lui disant qu’il est évident qu’en sa présence, on ne pourrait rien me faire, ni encore moins m’arrêter. Le plaidoyer du Ministre convainc Papa. Quand plus tard, on m’arrêtera, il mettra du temps à pardonner à Désiré Tagro et à accepter de parler avec lui, malgré mon insistance pour essayer de ménager les susceptibilités. On ne se met pas a mal pas trop longtemps avec un ministre de l’Intérieur, même si on est ami du Président de la République, lui avais-je dit.
Bien que convaincu que d’une manière ou d’une autre, j’aurais été arrêté, Papa estimait que le Ministre Désiré Tagro s’était foutu de lui en faisant procéder à mon arrestation, après lui avoir demandé de se porter garant de ma sécurité et de ma liberté pour m’inciter à me rendre à ses bureaux. Papa avait le lourd sentiment de culpabilité de m’avoir conduit dans un guet apens.
(*) : Papa c’est feu Ben Soumohoro . Trois personnes citées n’étaient plus en vie au moment où le livre était publié. Il s’agit de Criwa Zeli, Tapé Koulou Laurent et Désiré Tagro ( Paix à leurs âmes ! ).
Notre histoire avec Laurent Gbagbo, 2013, L’harmattan