Élu maire de San Pedro depuis 2019, Félix Anoblé Miézan est incontestablement l’homme fort incontournable de l’espace politique de la région de San-Pedro. Sa carrière politique se déroule essentiellement à San Pedro.
Le développement économique de San Pedro repose sur les activités du Port autonome de San Pedro (PASP). Dans les années 1960, Félix Houphouët-Boigny, soucieux des politiques d’aménagement du territoire, avait lancé l’« opération San Pedro », un programme ambitieux avec la création d’une ville nouvelle, la construction d’un port en eau profonde et le développement de grandes unités agricoles et des agro-industries.
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Homme de convictions et d’engagement, tant dans la sphère politique que dans la vie économique et sociale, son regard porte au-delà de ses fonctions de maire de San Pedro. Si Félix Anoblé Miézan entend valoriser et développer les atouts économiques de sa ville, qui est le deuxième pôle économique de la Côte d’Ivoire après Abidjan, il veut faire de San Pedro un grand laboratoire de l’émergence de la Côte d’Ivoire.
Face aux enjeux économiques, sociaux et environnementaux, il souhaite créer une véritable synergie entre toutes les villes du littoral ivoirien. Dans son esprit, chaque ville du littoral a ses spécificités géographiques, climatiques, liens avec son arrière-pays, mais toutes les villes ont des défis communs à relever, notamment dans le domaine touristique. San Pedro, qui est déjà une importante station balnéaire de l’Ouest ivoirien.
La ville de San Pedro : un cas d’école
Sa formation, sa parfaite connaissance du monde politique et ses années d’expérience professionnelle dans la gestion de projets, font que Félix Anoblé Miézan cherche en permanence à assurer la cohérence politique, économique et juridique des projets qu’il porte, comme il cherche à associer tous les décideurs publics, les acteurs privés et la société civile aux prises de décision et aux processus de développement de la commune.
La ville de San Pedro est un cas d’école avec la confrontation des intérêts divergents entre l’activité économique et l’activité touristique. L’activité économique fait de la région la deuxième région la plus riche de Côte-d’Ivoire, grâce aux activités du port. Envers du décor : la ville de San Pedro a longtemps abrité le plus grand bidonville de l’Afrique de l’Ouest. Face à son avenir, San Pedro doit conserver son rang de puissance économique en développant ses activités portuaires et préserver son statut de station balnéaire de renom.
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Si, en matière d’activité touristique, San Pedro reste une station balnéaire réputée avec 150 kilomètres de plages aménagées et de nombreux sites paradisiaques, de nombreux endroits, comme la mythique plage de Monogaga, montrent l’état d’abandon dans lequel le tourisme ivoirien est tombé. Pour relancer l’activité touristique, Félix Anoblé Miézan vient de créer une ZAT (Zone d’Aménagement Touristique).
Selon Patrice Vaudelle, un des meilleurs spécialistes de l’économie du tourisme, « en matière de tourisme de loisir ou d’affaires, la trajectoire de la performance économique, nécessaire pour créer des emplois, n’est pas contradictoire avec l’ambition tout aussi nécessaire de réaliser une performance environnementale. San Pedro, station balnéaire de renom, doit préserver ses sites touristiques, mais, elle doit aussi, pour en assurer le développement et l’attractivité, offrir des infrastructures de qualité qui vont du réseau routier aux transports, en passant par l’accueil, l’hébergement, la restauration et les activités de loisir. »
Le littoral ivoirien, un espace convoité qui concentre tous les défis
À l’échelle de la planète, le phénomène de littoralisation est un processus qui tend à s’accélérer aujourd’hui avec une forte migration des populations vers le littoral. Les conséquences de la littoralisation sont une concentration croissante, le long des littoraux, des populations, des activités et des aménagements en raison de l’attractivité économique et résidentielle de ces zones. Ce phénomène de littoralisation est-il suffisamment analysé en Côte d’Ivoire ? Est-il suffisamment maîtrisé, alors que, selon le député-maire de la ville de San Pedro, Félix Anoblé Miézan, « la littoralisation va jouer un rôle de plus en plus important dans l’économie ivoirienne » ?
Dans sa thèse de doctorat consacrée à « La gestion intégrée des zones côtières en Afrique de l’Ouest », soutenue le 17 décembre 2019, à l’Université du Littoral Côte d’Opale, une université française située dans la région des Hauts-de-France, Mme Marina Céline Bayeba analyse « le cas de la Côte d’Ivoire ». Elle aborde, d’une manière exhaustive, tous les enjeux que représente le développement des villes du littoral ivoirien, démontrant qu’une gestion intégrée est loin d’être suffisamment mise en œuvre. Or, le littoral ivoirien subit actuellement de profondes transformations qui résultent des activités humaines avec une surexploitation entraînant une forte pollution (urbanisation galopante et incontrôlée, suractivités halieutiques et aquacoles, suractivités portuaires et maritimes, développement touristique, etc.). S’ajoute l’impact négatif du dérèglement climatique (catastrophes naturelles, montée des eaux, accroissement des risques de tsunami, inondations, érosion).
Agir ensemble pour une prospérité commune
Les villes du littoral ivoirien doivent agir ensemble autour des enjeux spécifiques du développement économique et de la protection de la zone littorale et marine. Si chaque ville présente des particularités géographiques, économiques, sociales et environnementales spécifiques et des enjeux différents selon les régions côtières, elles ont des préoccupations communes qui doivent les conduire à se regrouper dans une association destinée à devenir un lieu d’échanges, de partage du savoir et des expériences entre les élus, les professionnels de la mer et les partenaires publics et privés. L’intelligence et l’action collectives, pour une prospérité commune des villes du littoral, sont plus que jamais nécessaires.
On peut imaginer des « Assises du littoral » sur le thème suivant « Face aux défis actuels et aux crises majeures : quelle stratégie de développement pour les villes du littoral ? », sachant que : 1) aucune commune du littoral ne peut faire l’économie d’une analyse stratégique qui concerne l’articulation entre sa région, la mer et le littoral 2) le recul du trait de côte face aux risques d’érosion et de submersion conduit nécessairement à une action concertée pour obtenir de l’Etat, des collectivités et des bailleurs de fonds les moyens techniques et financiers afin de lutter contre de tels risques 3) seule une action concertée permet de développer de nouvelles opportunités économiques et trouver de nouveaux partenariats dans le cadre de la coopération décentralisée.
Pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, selon Félix Anoblé Miézan, « la recherche d’un équilibre entre le développement économique, l’amélioration du cadre de vie des populations et la protection de l’environnement devient une priorité absolue, ce qui suppose que tous les acteurs, – Etats, gouvernements, administrations, entreprises, universités, centres de recherche, société civile, médias -, soient mobilisés à l’échelle locale, régionale, nationale et mondiale.»
Christian GAMBOTTI – Agrégé de l’Université – Président du think tank Afrique & Partage – Président du CERAD (Centre d’Etudes et de Recherches du l’Afrique de Demain) – Directeur général de l’Université de l’Atlantique – Chroniqueur, essayiste, politologue. Contact : cg@afriquepartage.org