Le président sénégalais Macky Sall souhaitait modifier la constitution pour réduire son mandat de 7 à 5 ans. Cette volonté du chef d’État soumis au conseil constitutionnel n’a pas été accordée par cette dernière.
Le Conseil constitutionnel a considéré que la disposition relative à la limitation de la durée du mandat présidentiel contenue dans le projet de révision de la Constitution, « doit être supprimée, au motif qu’elle n’est conforme ni à l’esprit de la Constitution, ni à la pratique constitutionnelle”, a déclaré Macky Sall à la télévision sénégalaise.
Se conformant à la décision du Conseil constitutionnel, Macky va poursuivre son mandat en cours jusqu’à son terme en 2019.
Les positions de Macky Sall et la haute juridiction sénégalaise ont été commentées à Conakry par de magistrat, politiques et société civile.
”Est-ce que le vœux de Macky Sall n’était pas une disposition verrouillée par la Constitution, c’est-à-dire celle qu’on ne peut changer, s’interroge un magistrat guinéen, au micro d’Afrikipresse ? Parce que, explique Mohamed Éric Thiam, dans les dynamiques des constitutions, il y a des dispositions qui peuvent changer. ”Par contre, il y a des dispositions auxquelles la constitution a prévu qu’il ne faut pas toucher. S’il veut bien changer, il faut réformer la constitution. Mais si la constitution a décidé que c’est une disposition qu’il ne peut pas changer, alors le Conseil constitutionnel ne peut que rejeter. Je n’ai pas la constitution sénégalaise sous mes yeux pour être certain des raisons qui ont amené le conseil à décider ainsi. Mais si on dit que c’est une question soulevée par Macky Sall qui n’est pas conforme à la constitution. Je présume que ça doit être une disposition verrouillée”, a dit le magistrat.
”Appeler à un référendum, c’est son droit, parce que la constitution donne à la plupart des chefs d’État le droit de recourir au suffrage universel par référendum pour décider d’une question. C’est la meilleure manière de contourner le Parlement et la cour constitutionnelle. Mais en principe, quand le conseil constitutionnel se prononce sur une question et la rejette, elle ne peut plus venir au référendum”, raisonne M. Thiam.
Me Yansané Fatou Baldé, membre de société civile, souligne : ”dans ma compréhension du droit, je pense que même s’il y a changement de constitution aujourd’hui, il y a ce qu’on appelle le principe de non rétroactivité des lois. Si la constitution sénégalaise était modifiée, ce n’est plus cette constitution qui a élu Macky Sall. Donc, il va continuer ses sept ans. C’est à son second mandat, s’il est réélu qu’il va faire ses 5 ans. Lorsqu’on change de constitution, on change de République”.
La directrice exécutive de la coalition des femmes leaders de Guinée, pense que les partisans de Sall auraient dû trouver d’autres arguments, notamment en partant de la non rétroactivité de la loi, plutôt dire que 5 ans est petit pour un Président. ”Le Président des États-Unis est élu pour un mandat de 4 ans, et c’est la même chose pour le Ghana qui est devenu un pays émergent. Ce n’est pas le temps qu’un président fait à la tête d’un pays qui compte, ce sont les actes qu’ils posent pour pérenniser les acquis”.
Faya Lansana Milimouno, leader du parti Bloc Libéral, candidat malheureux de la dernière présidentielle, ”apprécie l’esprit très révolutionnaire de Macky Sall”.
‘En prenant cette décision, il va à contre-courant de ce que nous constatons au niveau des leaders africains. Pour cela, il faut lui tirer chapeau et l’encourager vers le renforcement de la démocratie et l’État de droit au Sénégal. En même temps, je trouve que le conseil constitutionnel est dans son droit de ne pas accepter qu’un mandat régulièrement donné par le peuple soir réduit par la volonté d’un individu, fut-il le bénéficiaire de ce mandat”, réagit l’opposant.
Se battant en Guinée pour l’établissement d’un État de de droit, le Dr Milimouno ne tarit pas d’éloges à l’égard de Macky Sall et du conseil constitutionnel qui lui demande de ne pas modifier la constitution pour un mandat qui est déjà acquis.
Aliou BM Diallo