Une longue lettre ouverte d’un journaliste africain résidant aux USA qui a décidé de prendre part au débat sur la nouvelles loi sur la presse en Côte d’Ivoire, a été publiée sur plusieurs sites d’informations. Afrikipresse qui a lu la lettre, publie un résumé pour aider au débat , et pour donner tort à ceux qui estiment que les préoccupations d’ordre corporatiste font oublier aux journalistes ivoiriens, l’exigence de pluralité , à travers l’absence de sons de cloche différents dans les médias locaux.
« En Côte d’Ivoire un projet de modification de la loi sur la presse défraie la chronique. C’est à tort, selon moi, que mes confrères et nombreux amis ivoiriens contestent vigoureusement comme il a été donné de constater, la nouvelle loi. J’ai du mal à comprendre leur colère, tant il est vrai que la nouvelle mouture de la loi qu’ils rejettent, est fortement identique à la loi actuellement en vigueur, et, mieux, encore, elle introduit pourtant des inovations en faveur des libertés et simplifie les procedures de création d’entreprise de presse.
Je note par exemple, que tirant les conséquences de l’interdiction de la privation de la liberté en matière de repression des délits de presse de façon générale, le projet interdit la garde à vue des auteurs présumés de ces infractions. N’est-ce-pas surencherir sans raison, que de qualifier de liberticide un projet de loi, qui “acte” une telle avancée ?
Dans le projet de loi, la presse en ligne ou numérique est désormais régulée et prise en compte. Cette presse, selon ma compréhension du projet, sera maintenant bénéficiaire de l’aide à la presse, alors qu’elle était livrée à elle-même et était sans avenir depuis plusieurs années, malgré le développement de ces médias.
D’autres avancées demandées par les professionnels lors des États généraux de la presse tenus à Yamoussoukro ( 29 au 31 Août 2012), par les resultats du seminaire de Grand-Bassam de décembre 2014, et dans les conclusions les conclusions de plusieurs reunions de concertation avec les organisations diverses du monde médiatique ont été pris en compte.
En un mot le projet de loi deposé sur le bureau de l’Assemblée nationale depuis courant septembre 2016, est en réalité l’œuvre concertée aussi bien du gouvernement que des journalistes ivoiriens.
Le consensus autour de ce projet semblait acquis après son adoption par le gouvernement. Les débats enthousiastes sur les réseaux sociaux qu’il m’avait été donné de suivre à l’époque , temoignaient alors que nul ne pouvait en douter d’une parfaite concordance de point de vue entre les parties prenantes.
Aucune critique sérieuse ne s’était fait entendre à l’époque ; et n’eût été la campagne électorale pour les législatives qui avait mobilisé la ministre Affoussiata Bamba qui s’était portée candidate à Cocody, la loi aurait été votée, sans coup férir, depuis décembre 2016.
Il convient ici de rappeler que l’article 24 du projet relatif au Directeur de la publication ( qui fait l’objet de controverse par les blogueurs et propriétaires de sites qui ne sont pas des journalistes professionnels ; NDLR ), , a été proposé tel qu’il est par les professionnels eux-mêmes afin d’empêcher qu’un individu étranger à leur profession, devienne le premier responsable légal et juridique d’un journal, ou d’un site d’information pour la seule raison d’y avoir investi des fonds.
S’agissant des conditions de création de l’entreprise de presse, elles ont été assouplies ainsi que cela figure à l’article 3 du Titre II dans le but de les rendre conformes au cadre légal en vigueur en matière de création d’entreprise, notamment à l’Acte Uniforme du traité OHADA relatif aux droits des sociétés commerciales et aux groupements d’intérêt économique.
Au titre des avancées on peut citer par exemple la nette diminution des sanctions pécuniaires qui peuvent frapper un journaliste convaicu de violation de la loi. Des réamenagments du CONSEIL NATIONAL DE LA PRESSE (CNP) ont été introduits au profit des producteurs d’information numériques et des agences conseil en communication. Et des possibilités de délai dans l’application des sanctions du CNP ont été implicitement prises en compte.
S’agissant de l’article 90, il conviennt tout simplement de rappeler qu’il met fin au renvoi opéré par la la loi de 2004 à certaines dispostions pertinentes du Code penal, en intégrant explicitement celles-ci au corps de la loi sur la presse elle-même. Ainsi en les appliquant, nul ne saurait désormais reprocher aux juridictions ivoiriennes d’appliquer le code pénal là où il leur est demandé d’appliquer uniquement la loi sur la presse.
Pour terminer, il faut noter que contrairement aux allégations peremptoires de certains journalistes, la nouvelle loi adoptée récemment en commissions par les députés ivoiriens, est bel et bien la même que celle transmise depuis septembre 2016 au Parlement . Il n’y a eu ni retranchement ni rajout.
J’en appelle à la responsabilité des journalistes et des acteurs des médias en Côte d’Ivoire pour se débarasser des a priori qui laissent croire que toute modification d’une loi sur une la liberté fondamentale qu’est la liberté d’expression, cache toujours un piège tendu par le pouvoir à ses administrés. Je leur demande de sortir de l’émotion pour des débats de fonds en admettant que le vrai problème c’est la loi de 2004, avec un renvoi au code pénal, un piège pourtant salué comme une avancée, depuis toujours.
Il faut croire que si l’objet était de corser l’addition, par des emprisonnements intempestifs des journalistes, sur la base des dispositions du code pénal qui y sont contenues, le gouvernement n’aurait exploré aucune piste nouvelle tant la loi de 2004 règle le problème avec l’article ancien qui est devenu l’article 90 de la nouvelle loi. ( Tiémoko Assalé, Joseph Titi et bien d’autres journalistes ont sejourné en prison, ou en garde à vue sous l’empire de la loi de 2004, NDLR ) ».
Maxwells B, New-York
Samedi 06 mai 2017
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