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    Côte d’Ivoire : décryptage exclusif de la polémique sur la CEI ou comment sortir de la crise

    Côte d’Ivoire : décryptage exclusif de la  polémique sur la CEI ou comment sortir de la crise
    Publié le
    Par
    Charles Kouassi
    Lecture 7 minutes
    Salon des banques de l'UEMOA et des PME

    Depuis l’avènement du président Alassane Ouattara, la question de la commission électorale indépendante (CEI), est au cœur des préoccupations de l’opposition ivoirienne, qui a boycotté certains scrutins au motif élections que la CEI n’est pas équitable et impartiale. Décryptage.

    De l’actuelle CEI

    Créée la par la loi N°2001-634 du 9 octobre 2001, modifiée par la loi N°2004-642 du 14 décembre 2004, elle-même modifiée par la loi N°2014-335 du 5 juin 2014, la commission électorale indépendante (CEI) est l’autorité administrative indépendante, chargée de l’organisation, de la supervision et du contrôle du déroulement de toutes les opérations électorales et référendaires dans le respect des lois et règlements en vigueur dans notre pays.

    Suite à la promulgation le 18 juin 2014, de l’actuelle loi sur la CEI qui a fixé le nombre des membres de la commission centrale à 17 personnalités, celles-ci ont prêté serment le lundi 11 août 2014 devant le Conseil Constitutionnel présidé par le professeur Francis Wodié de l’époque.

    Le 5 septembre 2014, une dissidence naîtra au sein de la commission centrale suite à l’élection de M. Youssouf Bakayoko comme président de la CEI. Les représentants du FPI, du RPP et de l’Eglise catholique qui ont claqué la porte ce jour-là finiront par réintégrer la commission en novembre, après que le bureau de la commission centrale précédemment de 6 membres, eût été élargi à 9.

    De la question du déséquilibre

    La commission centrale de l’actuelle CEI est composée de 17 membres dont 8, émanant du pouvoir, 4 de l’opposition et 5 de la société civile. Les décisions qui relèvent de la CEI sont acquises après délibération de la commission centrale chaque fois qu’elles ne sont pas attribuées au Bureau. Les délibérations sont prises à la majorité simple des membres présents. En cas d’égalité, la voix du président est prépondérante. « Il suffit que seuls les 5 de la société civile, les 4 de l’opposition, les 4, des partis au pouvoir et le représentant du chef de l’Etat soient les seules qui ont voix délibératives pour qu’on ait une CEI équilibrée. Les 3 fonctionnaires, les représentants des ministères de l’économie, de l’intérieur et du PAN pourraient être de simples conseillers, qui sont là pour éclairer sur les questions de finances, de loi et de la sécurisation des élections sans voix délibératives », propose une source proche du dossier.

    De la dissolution de l’actuelle CEI : pourquoi enfoncer une porte déjà ouverte ?

    Selon l’article 5 de la loi N°2014-335 du 5 Juin 2014, les membres de la commission centrale sont nommés par décret pris en conseil des Ministres pour une durée de 6 ans. L’article 9 stipule que le président de la CEI est élu par les membres de la commission centrale pour une durée de 6 ans, non renouvelable. « Les vice-présidents et les secrétaires généraux sont élus pour une durée de 3 ans, renouvelable une fois par la commission centrale » dixit, l’article 10. Cela signifie clairement que l’actuelle équipe de la CEI centrale qui a prêté serment le 11 août 2014 rendra le tablier en Août 2020. « Les élections sénatoriales, municipales et régionales de mars et Juillet prochain sont les dernières que nous organisons. Je ne comprends pas pourquoi l’opposition est pressée. Mais d’un autre côté je les comprends. Même si l’actuelle CEI ne sera pas habilitée à organiser les présidentielles d’octobre 2020 et les législatives couplées des sénatoriales de décembre 2020, (les municipales et régionales de Juillet 2018 seront renouvelées en 2023), ne serait-il pas possible,  afin de mettre en confiance l’opposition qui pourrait participer à ces élections, d’intégrer au sein de la CEI juste après les sénatoriales, d’autres représentants issus de l’opposition de façon exceptionnelle et dont le mandat termine en même temps que celui des autres , en août 2020 », plaide la même source citée plus haut.

    Mais n’est-ce pas ouvrir une boite de Pandore que de s’engager dans cette voie ?

    L’opposition ne gagnerait-elle pas à prendre le contrôle des commissions électorales locales (CEL) ? Car s’il doit y avoir fraude électorale, c’est bien depuis la base, sur le terrain et non à la commission centrale qui elle ne fait que recevoir les procès-verbaux issus des commissions locales.

    Le combat que l’opposition pourrait mener

    Selon la loi N°2014-335 du 5 juin 2014, portant création et organisation de la CEI, les activités de la commission électorale locale (CEL) se déroulent dans le cadre des sessions par un arrêté du président de la CEI. En clair, les commissaires locaux sont choisis à chaque fois qu’il y a une échéance électorale. Ils ne sont donc pas inamovibles comme ceux de la commission centrale (6 ans). Ils sont au nombre de 598, à savoir, 31 commissaires régionaux, 83 départementaux, 39 communaux, 424 sous-préfectoraux et 21 pour la Diaspora. Chaque commission locale comprend 9 membres (1 représentant du préfet régional ou sous-préfet, 4 du pouvoir et 4 de l’opposition). Le bureau de la CEL comprend 3 membres. La commission centrale d’Abidjan nomme pour chaque élection un superviseur par Commission locale.

    Afin de mieux contrôler le bon déroulement du scrutin, l’opposition ne gagnerait-elle pas à désigner des représentants intègres et non corruptibles au sein des CEL. Car souvent certains peuvent être influencés sont influencés par l’argent que leur proposent les candidats qui ont plus de moyens. Les PV sont signés par tous les représentants des partis, mais aussi des candidats. Avec les NTIC, les résultats peuvent être connus instantanément à l’aide des captures d’écran des PV après émargement envoyés à qui de droit, pour servir de preuves en cas de contestation.

    Si tous les partis politiques, ou candidats s’organisent comme la candidate Yasmina Ouégnin lors des législatives 2016, à Cocody, la CEI ne peut pas tripatouiller les résultats. Dans le contentieux électoral, c’est bien sur la possibilité ou non d’annuler des résultats sur le terrain que la crise s’est portée. Le camp LMP dénonçant la fraude a estimé qu’il fallait rejeter, et à refuser de donner sa caution au processus de consolidation. Les autres membres du bureau de la CEI, ont refusé. Ils ont estimé qu’il fallait proclamer les résultats tels que reçus, et laisser le soin au Conseil constitutionnel de s’occuper des requêtes et réclamations. Cela signifie bien que c’est à la base que tout commence, dans les bureaux de vote, les centres de vote, les comités communaux, départementaux et régionaux.

    L’autre combat que l’opposition devrait mener, est bien celui de l’inscription de ses militants sur la liste électorale. On ne peut pas prétendre gagner même avec une CEI majoritairement société civile ou remplie de GOR (Gbagbo ou rien) si sur le terrain, les militants ne peuvent voter , pour ne s’être pas inscrits sur la liste électorale. Car quelle que soit la CEI qui sera installée, elle évoluera selon un code électoral, des textes, et des délais  qu’il faudra bien respecter. Sans oublier le poids de l’exécutif dans la prise des décrets.

    La CEI n’est qu’une instance de proposition. C’est l’exécutif, à travers les moyens financiers et sécuritaires mis à sa disposition, ainsi que par la  prise de décret, qui crée les conditions pour faire fonctionner l’institution. C’est pour cela, que certains observateurs vont au delà de la question de la composition équilibrée. Ils interrogent même la nature même de son statut , et des lois qui la fondent, souhaitant en faire une instance comme l’Assemblée nationale, ou le pouvoir judiciaire.

    Charles Kouassi et Philippe Kouhon

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