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    Chronique du lundi – le rôle essentiel de L’UVICOCI – Bilan des 40 ans d’existence

    Chronique du lundi – le rôle essentiel de L’UVICOCI – Bilan des 40 ans d’existence
    Publié le
    Par
    Christian Gambotti
    Lecture 6 minutes
    Salon des banques de l'UEMOA et des PME

    L’UVICOCI a été en juillet 1983, elle pose, dès sa création, les jalons de ce qui est devenu, aujourd’hui, une priorité absolue : accompagner la politique de communalisation, afin d’inscrire les villes et les communes au cœur des stratégies de l’aménagement des territoires et du développement du pays. Esprit visionnaire, le premier président de l’UVICOCI, Martin Kouadio Kouakou (1983-1987), maire de Yamoussoukro, devenue en 1983 la capitale politique ivoirienne, sait que les villes et les communes ont vocation à devenir de véritables  moteurs de croissance. Il faut, pour cela, deux conditions : 1) l’Etat et les villes doivent harmoniser leurs actions dans le cadre de la communalisation totale du territoire national, l’un des principes majeurs du processus de décentralisation 2) les maires, afin de renforcer les pouvoirs locaux, doivent contribuer à l’amélioration de l’administration municipale et associer plus étroitement les populations à la vie de la commune et aux prises de décision.

    Quel bilan tirer de l’action de l’UVICOCI au bout de ces 40 ans d’existence et au moment où, le 5 juillet, un nouveau président va être élu ? Le bilan est certes positif dans de nombreux domaines. L’UVICOCI a su, selon ses objectifs, « établir et développer des liens de solidarité entre les communes de la République de Côte d’Ivoire », « coordonner les aspirations et objectifs communs et les soutenir auprès des pouvoirs publics », « assurer la protection matérielle et morale des maires des communes membres dans le cadre de leur fonction ». Elle a renforcé les capacités des élus locaux et des agents territoriaux, mis en place des stratégies de promotion de la coopération décentralisée. Beaucoup reste à faire, notamment pour une décentralisation totale et réussie avec le transfert des compétences de l’Etat aux collectivités.

    L’urbanisation incontrôlée : un frein à la croissance du pays

    L’UVICOCI a toujours voulu lutter contre une urbanisation incontrôlée, dénonçant l’absence de règlementation et de planification. Parmi les objectifs à atteindre figurent le contrôle de l’extension de la ville, la transformation planifiée de l’espace rural en milieu urbain et la maîtrise du phénomène récent de métropolisation. L’UVICOCI a aussi toujours dénoncé l’instabilité des découpages territoriaux qui freine le développement des centres urbains secondaires pourtant nécessaires pour atténuer l’hyper-concentration démographique et économique d’Abidjan.

    Une étude de la Banque mondiale, « L’Urbanisation diversifiée : le cas de la Côte d’Ivoire », montre que les villes sont des moteurs de croissance. Souleymane Coulibaly, Chef de programme, économiste en chef pour l’Afrique centrale à la Banque mondiale et principal auteur de cette étude fait le constat suivant : « Avec un revenu national brut (RNB) par habitant de 1 450 dollars en 2013, la Côte d’Ivoire ambitionne de devenir un pays à revenu intermédiaire d’ici 2030, ce qui représente un énorme défi. Pour atteindre un RNB de 4 100 dollars par habitant, correspondant à celui d’un pays à revenu intermédiaire, il faudra que le pays enregistre des taux de croissance annuels de 10 %. 

    Il devra donc bien gérer et rationaliser son urbanisation pour atteindre son objectif, les villes étant des moteurs de croissance. » Ce lien entre une urbanisation contrôlée et planifiée et un taux de croissance élevé est une évidence. Il ne s’agit pas de privilégier les grandes villes (Abidjan, San Pedro, Yamoussoukro), qui disposent d’un fort potentiel économique, mais de bâtir, au plan national, une architecture urbaine qui intègre les villes régionales (Bouaké, Korhogo) et les petites villes et les villages, lieux où se concentre l’essentiel du secteur agricole, qui reste le premier employeur.

    Le rayonnement économique des villes ivoiriennes encore sous exploité

    L’OCDE, la Commission Economique des Nations Unies pour l’Afrique et la Banque africaine de développement ont publié le 31 octobre 2022 un rapport intitulé « Dynamiques de l’urbanisation africaine 2022 – Le rayonnement économique des villes africaines ». Se référant à des études qui portent sur 2 600 villes de 34 pays africains, ce rapport établit trois constants : 1) les villes contribuent à l’amélioration des résultats économiques et du niveau de vie 2) Les bénéfices de l’urbanisation sur les performances économiques et la qualité de vie s’étendent au-delà des limites de la ville et profitent également aux zones rurales 3) les pôles urbains transnationaux émergent le long des côtes ainsi qu’à l’intérieur du continent, offrant de nouvelles opportunités de développement économique. 

    Les auteurs du rapport définissent alors les  priorités politiques, qu’elles soient locales ou nationales, qu’il convient de mettre en œuvre pour exploiter pleinement le potentiel de l’urbanisation : « le rôle économique des villes devrait être pleinement intégré dans la planification du développement national. Par ailleurs, les gouvernements locaux ont besoin d’une plus grande capacité fiscale et administrative pour devenir des acteurs clés du développement économique. » Les pouvoirs locaux doivent aussi relever de multiples défis : le maintien du lien social, la recherche de l’équilibre entre l’acceptation de la modernité et le respect du patrimoine, l’installation des villes vertes durables; l’amélioration des conditions et du cadre de vie des populations par un aménagement durable de l’espace urbain et la maîtrise de ses contraintes.

    Le rôle de l’UVICOCI (Union des Villes Communes de Côte d’Ivoire)

    Ce rôle est connu : promouvoir, en lien avec l’Etat, le développement harmonieux des villes existantes et  gérer la transformation de l’espace rural en espace urbain par la réglementation et la planification. Il s’agit de mettre fin au chaos urbain qui se caractérise par l’expansion sans fin de l’habitat précaire et des bidonvilles.

    Mais, le 5 juillet, le nouveau président de l’UVICOCI a aussi rendez-vous avec l’Histoire. Au-delà de ses missions qui sont largement documentées sur son site, l’UVICOCI a un autre rôle essentiel à jouer : promouvoir la cogestion de l’espace urbain par les pouvoirs locaux et les populations, afin de mieux lutter contre l’insalubrité, l’occupation illicite de l’espace public et  les incivilités. La cogestion urbaine est un enjeu fondamental qui intègre sans cesse des objets et des usages nouveaux. Des campagnes de sensibilisation, d’information et de communication devront être menées sur le thème « J’aime ma ville, je la respecte », afin que chacun se mobilise pour faire de l’espace urbain un cadre de vie agréable, les villes et les communes étant des lieus où s’élaborent des processus nouveaux de civilisation.

    Aucune société ne fonctionne sans une organisation et des comportements humains qui relèvent d’une civilisation. L’espace africain, longtemps essentiellement rural, a été géré par les figures de la tradition (le village, le chef de village, le droit coutumier). L’urbanisation fait naître une autre organisation contractuelle des rapports humains, un autre processus de civilisation dont la ville constitue l’acte de naissance avec le passage de la nomadisation à la sédentarisation. En 2022, 52,7 % des Ivoiriens résidaient dans des zones urbaines.

    Christian GAMBOTTI –  Agrégé de l’Université – Président du think tank Afrique & Partage – Président du CERAD (Centre d’Etudes et de Recherches sur l’Afrique de Demain) – Directeur général de l’Université de l’Atlantique (Abidjan) – Chroniqueur, essayiste,politologue. Contact : cg@afriquepartage.org

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