Le continent africain manque d’infrastructures de qualité permettant un développement plus efficace de son système de santé. Mais, grâce à l’avènement des nouvelles technologies et à un grand volontarisme de la société civile, des initiatives innovantes permettent d’espérer un meilleur accès aux soins. C’est le cas, par exemple, des maladies de cœur qui sont au centre de nombreux enjeux.
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) l’a encore rappelé dans son dernier rapport : les maladies cardio-vasculaires sont la première cause de mortalité dans le monde. Elles représentent 31% de la mortalité mondiale totale. Une fois ce constat réalisé, il est nécessaire de préciser que plus des trois quarts des décès liés aux maladies cardiovasculaires interviennent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire. Le continent africain est en première ligne.
Une pénurie de cardiologues
Comment affronter ce vaste problème ? Construire des hôpitaux et des infrastructures de qualité est un préalable. Miser sur la formation des médecins l’est tout autant. Car la pénurie de personnel de santé en Afrique se fait ressentir sur tout le territoire.
Au début de l’année, le site Africa Check a voulu vérifier quels étaient les pays les mieux pourvus en cardiologues. Le tiercé est le suivant : le Sénégal compte un professionnel pour 150 000 habitants (80 cardiologues au total), tandis que l’Afrique du Sud (1/260 000 habitants) et le Nigéria (1 cardiologue pour 580 000 habitants) suivent loin derrière. À titre de comparaison, la France compte 6 996 cardiologues sur son territoire ce qui représente une densité moyenne de 9 professionnels pour 100000 habitants. Plus qu’un écart, il s’agit d’un fossé…
La clé du numérique
Fort heureusement, des ingénieurs et des chercheurs planchent depuis plusieurs années déjà sur des solutions alternatives qui permettraient de pallier ces problèmes d’accès aux soins. Et notamment en ce qui concerne les maladies du cœur. En 2016, un certain Arthur Zang, jeune Camerounais passionné d’électronique, a finalisé son projet : le Cardiopad. Cette tablette offre la possibilité à chaque citoyen de mesurer ses données physiologiques cardiaques. Après avoir enregistré la fréquence des pulsations ou encore la pression artérielle, le Cardiopad peut ensuite envoyer les données à distance à un cardiologue afin que celui-ci établisse un diagnostic. En cas d’anomalie, un médicament peut être prescrit ou même un rendez-vous peut être fixé pour des examens complémentaires.
Cette idée ingénieuse trouvée par un jeune homme de 27 ans a pris son envol. Elle a convaincu les médecins du CHU de Yaoundé de son utilité, notamment pour les habitants des zones rurales, et bénéficié de plusieurs aides financières nationales et internationales. L’objectif de l’ingénieur est de pouvoir exporter des Cardiopad dans plusieurs pays africains d’ici 2020.
Les enfants au centre des préoccupations
D’autres initiatives ont également permis de venir en aide aux jeunes frappés par une maladie cardiaque. Comme celle qui s’est tenue à Abidjan (Côte d’Ivoire) du 13 au 19 mai 2017. Plusieurs associations – dont l’Association Française du cœur pour l’Afrique de l’Ouest (AFCAO) et la Fondation Children of Africa de la Première Dame de Côte d’Ivoire, Dominique Nouvian Ouattara, en partenariat avec l’hôpital Marie Lannelongue – se sont déplacées pour opérer une vingtaine d’enfants, âgés de 6 mois à 16 ans. Ces interventions majeures à cœur ouvert, destinées aux familles modestes, sont vouées à se perpétuer dans les prochains mois.
Autre projet au long cours : celui mené par La Chaîne de l’Espoir. Depuis plus de 20 ans, environ 2000 enfants ont été soignés auxquels s’ajoutent 100 à 200 enfants opérés directement en Afrique par les médecins de l’association et les équipes locales. Si les missions se déroulent principalement en Afrique de l’Ouest, La Chaîne de l’Espoir intervient également en Ethiopie, au Gabon, à Madagascar ou en Somalie. Elle a également participé à la création de structures spécialisées, notamment à l’Institut du Cœur, et apporté une aide matérielle précieuse (Hôpital de Fann, au Sénégal, et Institut humanitaire cardio-pédiatrique de Casablanca, au Maroc).
La Chaîne de l’Espoir vient par ailleurs de lancer l’opération 1 000 cœurs, qui vise à sauver 1 000 enfants porteurs de cardiopathies congénitales ou rhumatismales ces trois prochaines années. Elle met également en place des formations universitaires et de perfectionnement des connaissances en matière de chirurgie cardiaque au sein des facultés de médecine de Dakar, d’Abidjan et de Paris V. Plus que jamais, l’innovation technologique et le partage des connaissances et compétences sont les clés majeures de l’aide au développement pour la santé en Afrique.
Antoine Denivel