Didier Claes, le marchand d’arts africains belge vient de quitter le traditionnel quartier du Sablon à Bruxelles dédié aux arts anciens, pour s’installer dans les hauteurs de la ville. Dans le quartier huppé de l’avenue Louise, le Golden boy du marché des arts anciens a inauguré sa nouvelle galerie au mois de mai dernier. Pour celui qui a ouvert la première galerie d’arts anciens africains à Bruxelles en 2002, le quartier du Sablon a perdu de sa superbe.
« Le Sablon a perdu de son leadership, même s’il reste un lieu de référence, un centre névralgique pour le marché de l’art africain à Bruxelles, comme peut l’être le quartier de Saint-Germain à Paris. Mais aujourd’hui, il doit défendre sa place et redoubler de dynamisme », explique Didier Claes.
Désormais installé au cœur du quartier de l’art contemporain de la capitale européenne, le marchand d’arts classiques négro-africain espère donner une vitrine de prestige à l’art premier du continent noir, pour séduire de jeunes collectionneurs. Pour son exposition inaugurale, la nouvelle galerie Didier Claes présente des pièces issues de la tribu ‘’Léga’’.
Les ‘’Léga’’ sont établis dans l’est du Congo, pour la plupart, dans les forêts du Sud-Kivu et du Maniema, dans les régions de Mwenga, Shabunda et Pangi. Venus des environs de la rivière Lualaba à proximité de Kisangani et auparavant d’une région située encore plus au nord au pied du mont Ruwenzori (aux confins du Congo et de l’Ouganda), ils ont emprunté plusieurs directions pour parvenir à leurs terres actuelles. Là, ils sont entrés en contact avec les Pygmées qui se sont, entre autres, rapidement intégrés à leur système socioculturel. Faisant remonter leurs origines à un ancêtre éponyme Léga et à son épouse Pygmée, les Léga cultivent d’ailleurs un sens aigu de l’appartenance à un peuple unique. Si la culture Léga témoigne d’une telle homogénéité, c’est en grande partie dû à la société Bwami : institution centrale et dominante qui assume des fonctions économiques, sociales, politiques, religieuses, philosophique et artistiques. C’est en effet à cette association que se rattachent les formes très diverses de l’art Lega : assemblages, costumes, danses, gestes, chants, musique, poésie, proverbes et sculptures. C’est donc les sculptures appartenant aux Bitungwa, et fabriquées pour les ultimes étapes de l’initiation des membres du Bwami.
Depuis le 14, rue de l’Abbaye à Bruxelles, Didier Claes ne cache pas son engagement militant pour les arts classiques d’Afrique noire : « Je suis un marchand engagé, engagé pour une valorisation des arts anciens d’Afrique noire parmi les arts de toutes civilisations du monde. Il est clair que l’Afrique doit s’approprier son histoire, mais il ne faut pas que le monde oublie l’histoire de l’Afrique noire ».
Jean-Paul Oro
