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    340 milliards Fcfa rackettés aux populations en Côte d’ivoire : Human Rights Watch épingle des forces de sécurité

    340 milliards Fcfa rackettés aux populations en Côte d’ivoire : Human Rights Watch épingle des forces de sécurité
    Publié le
    Par
    Dasse Claude
    Lecture 4 minutes
    Salon des banques de l'UEMOA et des PME

    L’organisation internationale, Human Rights Watch accuse des forces de sécurité de la Côte d’Ivoire d’ « extorsion et de racket » aux barrages routiers.

    Dans un communiqué daté du 29 juillet, transmis à Afrikipresse, l’ONG déclare que « l’extorsion par les forces de sécurité aux barrages routiers reste un grand problème en Côte d’Ivoire, quatre ans après que le gouvernement du président Alassane Ouattara ait pris l’engagement d’y mettre fin ».

    Jim Wormington, chercheur sur l’Afrique de l’Ouest à Human Rights Watch a expliqué : « bien qu’il y ait eu des progrès au cours des dernières années, le gouvernement du président Ouattara n’a pas fait assez d’efforts pour mettre fin à l’extorsion aux barrages routiers. Les forces de sécurité continuent de s’enrichir au détriment des Ivoiriens ordinaires, dont bon nombre ont déjà du mal à gagner assez pour joindre les deux bouts.»

    Pour lutter contre l’extorsion aux barrages, qui porte atteinte à la liberté de mouvement et au droit de propriété des conducteurs et des résidents dans ce pays, HRW exhorte les autorités à relancer leurs efforts.

    Pour connaître l’ampleur du phénomène en Côte d’Ivoire, Human Rights Watch dit avoir interrogé, en mai 2015, plus de 80 personnes à Abidjan, la capitale économique du pays, et dans l’ouest du pays. Les concernés sont essentiellement des conducteurs, des vendeurs du marché, des agriculteurs, des dirigeants communautaires, des responsables locaux ainsi que des membres des forces de sécurité.

    Selon l’Ong, la grande majorité des personnes interrogées ont déclaré que l’extorsion a diminué à Abidjan et sur les grandes routes parcourues par les hommes d’affaires et investisseurs étrangers, mais reste généralisée sur les routes secondaires dans les zones rurales. Le problème est particulièrement grave dans le nord, où Human Rights Watch a mené des recherches en octobre 2014, ainsi que dans l’ouest, qui possède une concentration relativement élevée des forces de sécurité, compte tenu des risques d’incursions et de criminalité transfrontalières.

    Une grande partie des actes d’extorsion que Human Rights Watch a documentés dans l’ouest de la Côte d’Ivoire sur les routes avoisinantes de Duékoué, Guiglo et Bloléquin, s’est produite à des barrages non autorisés occupés par des policiers, des gendarmes et des soldats.

    HRW estime que l’extorsion de fonds semble être bien organisée. Car, précise-t-on, les conducteurs transportant des passagers dans des taxis et des mototaxis paient un tarif quotidien fixe, habituellement de 500 à 1 000 francs CFA (entre 1 et 2 dollars US), à chaque point de contrôle, et les forces de sécurité font le suivi du numéro d’immatriculation de chaque conducteur afin de déterminer si la personne a payé. Les conducteurs ont affirmé que s’ils refusent de payer, les forces de sécurité trouvent une excuse pour les détenir temporairement, parfois pendant des heures. Un chauffeur de taxi à Guiglo a déclaré à Human Rights Watch : « Si vous ne payez pas, c’est le palabre. Si vous ne lui donnez pas sa part, il y a le palabre. »

    En 2014, une étude financée par la Banque mondiale et réalisée par l’ Ecole Nationale Supérieure de Statistique et d’Economie Appliqué a estimé le coût annuel total de l’extorsion de fonds sur les routes pour l’économie de la Côte d’Ivoire à 340,5 milliards de francs CFA (567 millions de dollars US) – un montant extraordinaire, bien que moindre que les 369,6 milliards de francs CFA (616 millions de dollars US) dont la même institution a déclaré qu’ils ont été perdus du fait de l’extorsion en 2012.

    Qui paye les agents ?

    Le communiqué rapporte que les forces de sécurité n’exigent habituellement un paiement des passagers que s’ils transportent des marchandises commerciales, comme lorsque les villageois amènent des produits vers les marchés hebdomadaires. Toutefois, les immigrants en provenance des pays voisins sont souvent ciblés pour l’extorsion de fonds, même lorsqu’ils voyagent en tant que passagers sur des mototaxis, dans des taxis ou des gbaka (minibus).

    De l’autre côté, des dirigeants communautaires ont déclaré à Human Rights Watch que les immigrants du Burkina Faso sont particulièrement ciblés à Bloléquin et dans ses environs, où les forces de sécurité confisquent souvent les documents de résidence et exigent jusqu’à 3 000 francs CFA (6 dollars US) pour les rendre, affirmant à tort que les papiers ne sont pas valables parce qu’ils ont été obtenus dans une autre localité.

    Pour cela, les membres des forces de sécurité détiennent ‘’illégalement’’ les personnes qui refusent ou ne parviennent pas à payer.
    « Depuis sa création en 2011, le travail de l’Unité de lutte contre le racket a été miné par un soutien financier irrégulier de la part du gouvernement ivoirien et par l’incapacité des commandants des forces de sécurité à discipliner les contrevenants ou à les renvoyer aux fins de poursuites », dénonce l’organisme international.

    Où part l’argent racketté ?

    Plusieurs sources ont déclaré à Human Rights Watch que les agents et même leurs supérieurs prennent souvent une part de l’argent collecté aux barrages. La réticence des subordonnés à fournir des informations sur leurs supérieurs signifie que ces derniers font très rarement l’objet d’enquêtes et de poursuites. Le tribunal militaire, qui en vertu du droit ivoirien a compétence sur les policiers, les gendarmes et les militaires, avait, à juillet 2015, omis de statuer sur tous les cas soumis par l’unité anti-racket en 2015.

    Aliou BM Diallo, à Conakry

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