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    ‎Nucléaire : avantages et pesanteurs de l’accord-cadre avec l’Iran (Analyse)

    ‎Nucléaire : avantages et pesanteurs de l’accord-cadre avec l’Iran (Analyse)
    Publié le
    Par
    Charles Kouassi
    Lecture 8 minutes
    Salon des banques de l'UEMOA et des PME

    AFRIKIPRESSE -Abidjan.1. L’accord-cadre historique du 2 Avril 2015 trouvé à Lausanne (Suisse) entre la communauté internationale et l’Iran, après plus d’un an et demi de négociation;

    2. l’image des populations en liesse à Téhéran;

    3. le premier discours d’un Président américain diffusé sur écran géant dans la capitale iranienne depuis 1979;

    4. le Ministre des Affaires Etrangères d’Iran et l’équipe de négociateurs accueillis en héros à Téhéran;

    symbolisent la normalisation des relations de coopération entre le reste du monde et l’Iran , ainsi que le retour de ce pays sur la scène internationale. De loin, l’accord-cadre constitue le meilleur enseignement de géostratégie et de rapprochement des peuples d’idéologies et de modes de production antagonistes, sous l’impulsion du premier Président noir américain, Prix Nobel de la Paix et du premier Président iranien qui n’est pas un réformateur mais un conservateur modéré dont la perception de l’accord-cadre s’articule autour de trois (3) points, à savoir :

    1. l’ouverture politique de l’Iran;

    2. la réussite des négociations sur le nucléaire avec la communauté internationale;

    3. l’amélioration des conditions de vie des populations iraniennes.

    L’Iran avait le choix entre trois (3) options, à savoir :

    1. Première option : continuer se battre contre le reste du monde depuis 2005;

    2. Deuxième option : capituler sous le poids des sanctions internationales;

    3. Troisième option : négocier et coopérer avec le reste du monde.

    En économie, un programme d’ajustement structurel ne crée pas la croissance économique. Il assainit l’environnement dans lequel se crée la croissance. De même l’accord du 2 Avril 2015 permet aux parties d’assainir le cadre et de s’entendre sur les paramètres avant la signature de l’accord définitif en Juin 2015.
    Il constitue le premier pas vers l’ouverture d’une page de la coopération entre l’Iran et le reste du monde. Il ne réduit pas les relations du monde avec l’Iran, un acteur incontournable dans le développement des enjeux économiques et politiques ainsi que dans la puissance et l’influence militaires dans la région du golfe persique. Il les soigne, les assure et les sécurise au bénéfice de la paix, préalable au développement.

    L’accord-cadre sur le nucléaire iranien ne doit pas être un effet d’annonce politique. Un cadre est trouvé mais il reste des détails pour programmer la levée des sanctions d’ici Juin 2015. À cette date, un accord définitif est de l’ordre du possible. Cependant, il ne signifie pas une collaboration étroite entre l’Iran et la communauté internationale sur le court terme, en raison des pesanteurs, enjeux, interférences et réactions en Iran et en Amérique.

    L’accord-cadre confirme la détermination et la volonté des Présidents américain et iranien

    1. de renforcer leur leadership en développant une influence constructive et inclusive sur la paix mondiale et la coopération entre pays d’idéologies politiques opposées mais d’intérêts stratégiques complémentaires au plan économique et de la promotion du nucléaire civil au développement ;

    2. d’agir de manière préventive sur l’exploitation de l’arme nucléaire à des fins terroristes et de destruction massive;

    3. d’impliquer la communauté internationale à la surveillance des engagements et promesses de l’Iran de réduire sa capacité nucléaire à long terme et son renoncement à produire du plutonium, en échange de la levée des sanctions.

    Une décennie après l’imposition des sanctions sur l’Iran, ce qui unit les Président américain et iranien est plus fort en 2015 que ce qui les divise. Leur dénominateur commun tient à l’intérêt majeur pour le Président iranien de se passer vite des sanctions pendant son premier mandat et pour le Président américain de redorer son blason au plan de la politique étrangère, en renforçant la qualité de sa vision de la paix mondiale et de la détente régionale qui le prédestine à une sortie par le haut en fin de second mandat, à travers l’écodiplomatie vertueuse au profit du bon voisinage et du rétablissement des relations diplomatiques avec Cuba ainsi que de la coopération économique entre pays ennemis d’hier, notamment la Chine et l’Iran.

    L’Amérique salue l’entente historique avec l’Iran qui ouvre une nouvelle ère entre ce pays et le reste du monde. La France considère l’accord d’étape comme positif, mais il reste du travail. Pour la communauté internationale, l’accord renforce la sécurité d’Iran, d’Israël et de la sous région. Pour Israël, le retour de l’Iran sur la scène internationale doit passer forcement par le devoir de s’engager à reconnaître à Israël le droit d’exister dans un accord définitif sur le nucléaire d’ici Juin 2015. En clair, il y’aura un accord définitif si les deux parties, la communauté internationale et l’Iran respectent leurs promesses.

    L’accord-cadre a le mérite d’enseigner au monde cinq (5) notions essentielles de la haute négociation, à savoir :

    1. la notion de leadership

    Le leadership des Présidents américain et iranien ainsi que celui des négociateurs présents à Lausanne est avéré, fort et indéniable;

    2. la notion de redevabilité

    La redevabilité est une pratique essentielle de la bonne gouvernance. L’obligation de rendre compte à son peuple participe de l’exercice démocratique du pouvoir en posant des actes que l’histoire retiendra et en acceptant d’être jugé sur les actes que l’on pose, le bilan, le projet, le programme et les réalisations effectives. Une promesse n’a de sens que si elle est accompagnée d’un engagement et de l’obligation de rendre compte un jour.

    3. Le refus de la notion d’irrésolution

    L’irrésolution est une approche impossible et une pensée frauduleuse pour un homme d’action. A tout problème il y’a au moins une solution. La fin de tout conflit est possible. Elle peut s’obtenir par la négociation, la concession, le sacrifice, le compromis et la volonté sincère d’aboutir à un résultat mutuellement avantageux, loin du bal des hypocrites qui bétonne le mur de méfiance et éloigne la confiance réciproque.

    4. la notion de rapport de force

    Lorsque l’allié stratégique régional d’une grande puissance économique et militaire se transforme en allié encombrant contre les intérêts et la vision de paix mondiale de la grande puissance, cette puissance peut dérouler le rouleau compresseur pour non seulement redorer son blason de suprématie mais aussi stabiliser et renforcer l’équilibre de la coexistence pacifique entre son allié stratégique régional et le diable de sa politique étrangère par la haute négociation.

    5. la notion d’accord-cadre

    L’accord-cadre sur le nucléaire iranien n’est pas un traité qui passe par le Congrès américain. C’est un accord exécutif. Il n’y aura pas de vote au congrès américain mais un grand débat. Le Président américain va tenter de convaincre le congrès du bien fondé de l’accord. Pour le congrès, l’accord est une erreur
    historique car l’Iran est le diable de la politique étrangère de l’Amérique.

    Le congrès américain peut-il prendre la responsabilité d’un grand échec diplomatique en tuant l’accord ?

    Il est impossible que ce soit le cas pour les cinq (5) raisons évidentes suivantes :

    1. L’Amérique ne veut plus de confrontation idéologique stérile et de guerre à l’étranger dont les coûts économique et social sont plus élevés par rapport à la rentabilité financière de la normalisation des relations, de l’apaisement, de l’ouverture et de la confiance réciproque. La guerre en Irak et en Afghanistan pendant 15 ans a laissé des traumatismes, des frustrations, des déchirures, des plaies, des cicatrices indélébiles, des souvenirs et blessures difficiles à soigner sur les soldats américains au front et la société civile américaine dans son ensemble;

    2. Aux Etats Unis d’Amérique, la croissance économique est au cœur des préoccupations en 2015. Le dollar fort actuellement nuit aux exportations américaines face à la faible croissance économique en Asie et en Europe. La machine se grippe au plan de la création d’emplois. Environ 216.000 postes ont été crées en Mars 2015 contre 200.000 en moyenne ces 12 derniers mois bien que le chômage soit stable à 5,5% en Mars 2015 et le salaire moyen ait connu une augmentation de 2,1% en Mars 2015. Comme en France, la croissance est tirée en Amérique par les secteurs automobile et aéronautique suivis de l’industrie du luxe, trois (3) secteurs à haute intensité d’exportation vers la Chine, Cuba et l’Iran en perspective.

    3. En Iran le malaise économique est plus profond. Depuis dix ans, l’embargo économique a eu des impacts négatifs sur les secteurs automobile, aéronautique, pétrolier et l’importation du matériel technologique. Le niveau du chômage est catastrophique. Le taux d’inflation est de 15% en 2015. Le taux de change est très élevé par rapport au dollar américain. Les sanctions économiques ont eu de lourdes conséquences sur les conditions de vie et de travail de l’iranien moyen. Malgré les démonstrations de force de l’Iran et la rhétorique incendiaire contre l’Amérique, les angoisses, les craintes et les attentes des populations sont réelles quant à fin de l’isolement du pays et de la détérioration des termes de l’échange avec l’occident. L’Iran aspire à la fin des tensions et à la coopération avec le monde ainsi qu’à son retour sur la scène internationale.

    4. dix ans de sanctions économiques de l’occident et d’embargo américain ont transformé en 2015 l’Iran en un vaste marché vierge pour les biens de consommation et d’équipement occidentaux avec un pouvoir d’achat à relancer. La création de richesses y est rapide car l’Iran dispose déjà du capital et du travail, de la technologie et du savoir faire, de l’expérience et de l’expertise bon marché, facteurs incitatifs de délocalisation des entreprises occidentales, de partenariat public privé et de création de joint ventures, d’intégration aux communautés économiques régionales et à l’économie mondiale.

    5. L’Iran est sur la voie du changement. L’Iran ne trichera pas, a dit le Président iranien au monde.

    Laurent Maurice Kouakou

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