Le politologue et essayiste ivoirien Geoffroy-Julien Kouao, propose la tenue d’un débat à la suite du message du président de la République sur l’état de la nation devant le parlement réuni en congrès, le mardi 25 avril 2023.
Dans une contribution, le politologue et essayiste Geoffroy-Julien Kouao fait deux propositions pour les prochains messages sur l’état de la nation du chef de l’État.
Monsieur Kouao demande d’une part que les anciens présidents de la République soient invités à la cérémonie, et d’autre part, qu’un débat soit engagé entre les parlementaires ou qu’une séance de questions-réponses soit ouverte entre le président et les représentants du peuple. Ci-dessous
sa contribution
“Conformément à l’article 114 de la constitution du 8 novembre 2016, le président de la république était, le mardi 25 avril 2023, devant les parlementaires réunis en congrès pour son message annuel sur l’état de la nation. Dans l’histoire politique de la Côte d’Ivoire, c’est la sixième intervention d’un chef de l’État devant le parlement. En effet, le 15 janvier 1962, le président Félix Houphouët-Boigny s’est adressé aux députés à l’Assemblée nationale. Le 22 décembre 1999, le président Henri Konan Bédié était face aux députés dans un contexte idéologique marqué par le concept de l’ivoirité. En Octobre 2016, le président Alassane Ouattara est venu à l’Assemblée nationale présenter aux députés l’avant-projet de constitution de la troisième république. Le 5 mars 2020, devant le parlement réuni en congrès à Yamoussoukro, le président Alassane Ouattara a dit aux sénateurs et députés qu’il ne sera pas candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2020. Le 19 avril 2022, le message du président Ouattara a été marqué par la nomination du vice-président de la république. Le message du président de la république, le mardi 25 avril 2023, s’inscrit donc dans une constante constitutionnelle.
Après avoir suivi attentivement le déroulement de cette cérémonie, je fais, modestement, deux remarques qui prennent valeur de propositions. D’abord, ce fut un grand moment politique surtout d’unité nationale. Toutes les institutions politiques, économiques, sociales et culturelles étaient présentes dans la salle. Un beau moment de communion nationale.
L’article 54 de la constitution prenait tout son sens : « Le président de la république est le chef de l’État, il incarne l’unité nationale ». Cependant, il y avait l’absence de deux grandes personnalités, les anciens présidents de la République, Henri Konan Bédié et Laurent Gbagbo. La présence des deux prédécesseurs du président Alassane Ouattara aurait donné une plus value politique et symbolique en termes d’unité et de communion nationales. La direction du protocole d’État devrait, dorénavant, songer à inviter les anciens présidents de la République, ès qualité, à cette belle rencontre républicaine.
Ensuite, la constitution dispose que le message du président de la République ne donne lieu à aucun débat. C’est clair. Cependant, je pense qu’on peut améliorer cette disposition constitutionnelle. Nous sommes, en Côte d’Ivoire, dans une République et dans une démocratie. Les mots ont un sens. La République se caractérise par l’horizontalité de la gouvernance politique. Quant à la démocratie, sa consubstantialité renvoie à la contradiction, au débat.
Je propose, de deux choses l’une, soit qu’à la fin de sa prise de parole, le président de la République réponde, personnellement, aux questions des parlementaires, soit, après son départ, que le débat s’ouvre entre les députés et sénateurs présents. En France, par exemple, le message du président de la République est suivi, hors sa présence, d’un débat parlementaire. En 2018, lors de sa deuxième intervention devant le parlement français réuni en congrès, le président Emmanuel Macron a proposé la révision de l’article 18 de la constitution du 4 octobre 1958, pour que le président de la République puisse assister au débat parlementaire consécutif à son message et répondre aux questions des sénateurs et députés français. Je pense qu’un échange, sous la forme de question-réponse, entre le chef de l’exécutif et les membres du parlement, atténuerait le caractère monarchique de cette institution républicaine tout en renforçant la collaboration entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif”.