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    J’ai été violée, c’est l’enfer, en Côte d’Ivoire si Gbagbo sort : Diéhi Victorine, réfugiée au Ghana

    J’ai été violée, c’est l’enfer, en Côte d’Ivoire si Gbagbo sort : Diéhi Victorine, réfugiée au Ghana
    Publié le
    Par
    Dasse Claude
    Lecture 6 minutes
    Salon des banques de l'UEMOA et des PME

    Mère de 5 enfants, de retour de ses activités, ce vendredi 13 octobre 2017,   dame Diéhi Victorine, Lavandière ambulante d’habits dans la zone du camp des réfugiés d’Ampain (Ghana), a raconté son quotidien. Sans tabou, la réfugiée ivoirienne explique, en présence de deux de ses enfants, les risques auxquels elle est confrontée et lance un appel..

    Nous vous avons vu arriver avec le bois de linge sur la tête. Pouvons-nous savoir d’où veniez-vous ?

     Je viens de Diama (Un village environnant NDLR )

    Et que faites-vous là-bas ?

    J’habite le camp ici, mais je suis allée là-bas pour faire la lessive. En tout cas, tous les matins, je me lève et je passe dans chaque cour pour demander aux habitants s’il y’a du linge à laver moyennant de l’argent. Ceux qui sont d’accord, me proposent leur linge à laver, et je fais le prix. Mais  ce n’est pas facile. Si le prix du linge total à laver équivaut à 10 cedis (environ 1500 Francs Cfa) par exemple,  ils vont le réduire jusqu’à 2 cedis. Mais comme nous avons des problèmes dans le camp, nous sommes obligées d’accepter ces prix qui sont souvent très bas. Si vous avez des enfants, et que vous n’avez rien à leur donner à manger, vous êtes obligé d’accepter le prix qu’ils vous proposent. Lorsque je fais mon prix, les Ghanéens proposent des prix qu’ils veulent, et je me soumets à cela parce que les enfants sont là et ils doivent manger.  C’est comme cela que je fais, et même s’ils y’a une douche, je la lave également, si on m’en fait la proposition. Même si c’est pour puiser de l’eau pour remplir des barriques, je le fais. Souvent, je vais dans des champs de manioc pour désherber. Puis, il y’a des fois où je me rends au ‘’Galamsey’’ (sur le site de l’orpaillage artisanale : Ndlr) pour charger de lourds cailloux sur la tête,afin que je puisse gagner à manger avec mes enfants. Ici, je suis avec mes enfants, je n’ai pas de mari. Il est décédé depuis la guerre. Je viens de Duékoué. Ici, c’est vraiment l’enfer. Le HCR ne nous donne plus à manger depuis deux ans et demi. Si vous la femme, vous ne vous réveillez pas tôt pour aller faire la lessive des Ghanéens, ou vous soumettre à des travaux pénibles, vous ne pouvez pas vous en sortir avec votre famille. Et c’est comme cela, le quotidien de nous les femmes du camp, je ne suis pas la seule, nous sommes beaucoup. Nous sortons les matins pour aller chercher de quoi nourrir notre famille. Tous les jours que Dieu fait, c’est ce que je fais. Mais, souvent, je vais et il n’y a même pas de transport pour revenir, parce que je ne trouve aucun client. Ceux qui ont pitié, lorsque vous leur expliquez votre problème, ils vous payent le transport. Parce qu’ici à Esiama, il faut le transport. Le taxi coûte 2 cedis allez, 2 cedis retour, ça fait 4 cédis au total. ( un cédi fait entre 125 et 150 Fcfa).

    Madame, nous avons appris que certaines lessiveuses sont confrontées hélas à des cas d’abus sexuel de la part de certains clients malveillants ?

    Oui ! Moi-même, j‘en ai été victime. Une fois, j’étais avec la femme de l’un des présidents du camp, et il y’a quelqu’un qui nous a demandé de monter dans sa voiture, sous prétexte qu’il voulait qu’on lave ses habits, et il nous a conduit dans la brousse où il y avait un puits d’eau. Une fois arrivés là-bas, il sort la drogue, et il nous demande qu’on fume avec lui. Nous lui avons répondu qu’on voulait d’abord acheter de quoi à manger, et c’est comme cela que nous nous sommes échappées. Mais moi-même, il y’a un monsieur qui m’a violée. Mais comme nous ne connaissons pas les règles du HCR, l’histoire est restée comme cela.

    Et comment ça s’est passé ?

    Il m’a prise en voiture au niveau du cimetière de N’zima et nous sommes allés vers Kuitam. Là-bas, il y avait une cour en construction qui doit être la sienne. Il est seul dans la maison,mais la cour est en construction, avec une seule porte d’entrée et de sortie. Il m’a donné le linge que j’ai fini de laver dehors. Et je suis rentrée vers lui pour lui dire que j’ai fini, que je voulais mon argent pour rentrer. Et tout d’un coup, il m’a attrapée, j’ai crié de toutes mes forces, mais nous étions que deux dans la cour, et il a fait ce qu’il voulait. Moi, je ne connais même pas l’endroit. Je ne maîtrise pas bien l’entrée parce qu’il était véhiculé, mais on dirait que c’était une voiture de service. Et c’est vers le cimetière il m’a vue et il m’a fait monter dans la voiture et nous sommes partis. Lorsqu’il a fini, il m’a mise dans la voiture, et il est venue me déposer à N’ziama et il est reparti. Je ne le connais pas

    Vous n’avez pas porté plainte ?

    Je ne comprends pas anglais, et je ne comprends pas N’zima, leur langue d’ici. Souvent, il y’a des hommes qui nous proposent de l’argent pour coucher avec nous. Nous sommes confrontées à tout cela. Quelques fois nous rencontrons des Ghanéens qui ont fait la Côte d’Ivoire qui se moquent de nous en disant : «ah, ce sont les Ivoiriennes qui sont des lessiveuses aujourd’hui ». Ils se moquent de nous. À N’zima, la majorité parle français parce qu’ils ont fait la Côte d’Ivoire.

    Face à ces risques de plus en plus fréquents dans le cadre de vos activités que vous faites, quelles dispositions sécuritaires avez-vous prises désormais ?

    Désormais lorsque qu’un client est seul dans sa maison, je n’y vais pas. Si c’est une femme comme moi, j’y vais mais pas un homme. (…) Vraiment, que les autorités viennent nous aider. Qu’on fasse tout pour enlever Laurent Gbagbo en prison parce que j’ai trop fait pour le FPI en Côte d’Ivoire. Ce que je demande, c’est qu’on retire Laurent Gbagbo de prison. Si Laurent Gbagbo sort de prison ce matin, le soir, nous sommes en Côte d’Ivoire. Nous souffrons vraiment beaucoup ici : femmes comme hommes . Lorsque les hommes du camp ont un petit contrat et qu’ils vont travailler, les Ghanéens ne les payent pas. Vraiment nous souffrons beaucoup. Aujourd’hui, le HCR ne nous aide plus. Tant sur le plan alimentaire,que sur le plan médical, nous sommes livrés à nous-mêmes, avec nos enfants. Nous avons tous les problèmes.

    Claude Dassé, envoyé spécial au Ghana
     
     
     
     
     

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