À quoi sert le boycott de l’élection présidentielle ivoirienne du 25 octobre 2015 et l’attente d’un fort d’abstention dans un contexte où le scrutin considéré à tous les coups comme biaisé, par l’opposition à Alassane Ouattara et au Rhdp.
S’il est vrai que la Cei organise un scrutin biaisé, le boycott et l’abstention auront forcément des résultats biaisés.
Le boycott et l’appel à l’abstention se veulent une réponse démocratique dans un contexte que l’opposition trouve pourtant non démocratique. Est-on plus crédible à dénoncer dans l’abstention et le boycott l’absence de démocratie , que dans la participation pour obtenir la démocratie ?
Les adversaires du Rhdp ne sont-ils pas coupables de n’avoir pas cru en eux , d’avoir succombé à la propagande de Ouattara et d’avoir cru à tort que le président ivoirien sortant gagnait et gagnait dans tous les cas de figure.
Au lieu par exemple de se donner les armes de la victoire, l’opposition ivoirienne a réclamé en vain une transition et la mise hors jeu de Ouattara , à défaut d’une élection à ses seules ou meilleures conditions, récusant le processus tel qu’il était conduit par le gouvernement ivoirien.
Sans avoir les mêmes moyens de pression, ( comme par exemple une partie du territoire), les mêmes ressources financières que les autres à l’époque contre Laurent Gbagbo, l’actuelle l’opposition ivoirienne a voulu obtenir de Monsieur Ouattara, ce que ce dernier et l’opposition d’hier avaient obtenu de Gbagbo.
Il se trouve pourtant que malgré les armes et les moyens de pression de ses adversaires, Laurent Gbagbo n’avait jamais cédé sur tout et a résisté – armé et fort aussi bien de l’autorité de l’État que de l’adhésion ou de l’acceptation d’une bonne partie du peuple. Une réalité que ses adversaires qualifiaient pourtant de dictature !
Pourquoi et comment Ouattara qui n’a pas d’armes contre lui céderait à tout, alors que , malgré même les armes contre lui Gbagbo n’a pas tout cédé?
Dans l’opposition contre Houphouët-Boigny ,contre Bédié et contre Guei, Laurent Gbagbo avait su s’allier peu à peu les syndicats qui savaient lancer des grèves “opportunes” ou opportunistes.
Il avait même fondé une association de parents d’élèves avec Marcel Gossio et avait peu à peu crée des contrepoids à la main mise des différents régimes sur les leviers de la société, en plus des Appareils Idéologiques d’Etat. L’opposition actuelle n’y a pas encore totalement travaillé ou peut-être le fruit n’est pas encore mur.
En Côte d’Ivoire le gouvernement Ouattara a su reculer face aux travailleurs et aux grévistes dont les salaires avaient été ponctionnés pour fait de grèves. C’est dire qu’il peut y avoir de la flexibilité dans la fermeté de Ouattara.
Si le camp du boycott et de l’abstention avait pu rallier à sa cause des syndicats comme celui des médecins, des enseignants, des transporteurs, et les fonctionnaires, ainsi que des Ong, cela aurait bien représenté sur le président Ouattara, la pression que les armes ont représenté pour Laurent Gbagbo.
Comment aspirer incarner la majorité quand dans un pays les forces armées, l’Église , l’Islam, les syndicats et les Ong n’ont pas rejoint la cause de l’opposition sans oublier la communauté internationale qui appuie le processus en cours.
Au Burkina Faso , toutes ces forces vives avaient fini par se retrouver dans une aspiration commune contre Blaise Compaoré. Cette même situation a pu être observée face aux putschistes du Rsp et de Diendéré.
Si le Burundais Nkunruziza est encore aux affaires dans son pays malgré la pression internationale et la mobilisation de l’opposition, c’est peut-être aussi parce qu’une partie décisive de ces forces vives qui comptent dans le pays ne l’a pas encore lâché.
En Côte d’Ivoire l’aspiration commune et la synergie entre forces politiques et forces sociales non politiques, non politiciennes n’est pas encore trouvée pour pouvoir en plus des politiciens classiques ou professionnels, rassembler dans la rue et dans la révolte les hommes de Dieu, les travailleurs, les Ong et tant d’autres forces organisées.
Encore que là on a souvent vu le pouvoir Gbagbo résister aux grèves des médecins, des transporteurs,des greffiers etc, et y trouver des solutions, tant que les revendications qui mettaient à mal son gouvernement n’étaient pas ouvertement politiques.
Pendant longtemps l’opposition à Gbagbo avait espéré et même dit , alors qu’il accédait au pouvoir en l’an 2000 qu’il ne tiendrait pas plus d’un mois .
Malgré la crise, malgré la rébellion, malgré les alertes au coup d’État de toutes sortes , Laurent Gbagbo a fait dix ans et est parti du pouvoir plus populaire qu’à son arrivée.
L’opposition ivoirienne actuelle pourra-t-elle réussir si elle continue de porter et de partager le postulat de l’illégitimité et de l’imposture qu’incarnerait Alassane Ouattara pourtant très soutenu par Bédié.
Beaucoup d’opposants ivoiriens continuent d’estimer que les Ivoiriens et Ivoiriennes n’aiment pas et ne veulent point Ouattara, qu’il est impopulaire, qu’il s’est imposé à eux par la force. Mais qu’ils le subissent quand sans oser se rétracter .
Ces opposants pensent que leur point de vue est majoritaire, et attendent avec impatience le grand soir et la grande révolution insurrectionnelle qui emportera Ouattara et Bédié.
Avant l’élection de 2010, l’opposition à Gbagbo guettait de son côté, certains dossiers pour espérer le départ du pouvoir de l’ex président.
Cette opposition avait pensé par exemple que la manifestation de Mars 2004 avec les morts d’Abobo, les affaires Jean Hélène, Kieffer, les évènements de Novembre 2004, les déchets toxiques, les violences lors des audiences foraines sous Banny , les scandales dans la filière café cacao etc , pouvaient faire tomber Gbagbo considéré par Ouattara comme minoritaire et comme étant totalement rejeté par les Ivoiriens.
Une coupe du monde ou un championnat est remporté par l’équipe la mieux préparée. Dans l’élection en cours le Rhdp était l’équipe la mieux préparée. Bédié et Ouattara ont même commencé à préparer 2015 depuis l’hôtel du Golf et à partir du 11 avril 2011.
Le Fpi lui, depuis lors n’a jamais voulu participer à rien, exigeant que réconciliation se fasse à ses seules conditions, laissant dans l’attente et l’acceptat du dktat : « L le champ libre à la coalition au pouvoir, au point que le Pdci et le Rdr sont allés en rang dispersés aux législatives.
Ayant anticipé un retour d’un Fpi fort et recomposé dans le jeu politique, Bédié et Ouattara ont décidé de ne pas prendre de risques et d’unir leur forces. IIls n’ont pas oublié la leçon de Gbagbo : c’est la guerre des héritiers d’Houphouet qui a conduit à la crise, et qui lui a permis d’accéder au pouvoir après le coup d’État.
Que l’opposition actuelle se prépare mieux , quelle se structure, qu’elle rallie à sa cause des syndicats, les forces dites vives de la Nation, et qu’elle ne compte plus sur le miracle -qu’elle n’en appelle pas à Dieu qui est pour tous- pour tout chambouler.
Laurent Gbagbo avait bâti quelque chose avec le soutien de ses camarades. Sangaré et les autres opposants n’ont pas encore bâti et cconphament quelque chose par eux-mêmes, et sans le nom de Gbagbo. Les camarades de l’ex-président attendent encore que Laurent Gbagbo revienne dans l’arène pour les sauver , pour nous sauver alors que c’est à eux- à nous- de le sauver.
Gbagbo n’est plus là pour suivre et poursuivre le long et patient travail réalisé jusqu’en 2000.
Une équipe de football ne peut signer forfait ni refuser de jouer parce que des joueurs vedettes tels que Messi, Ronaldo, Drogba et Zlatan seraient absents. Au contraire elle joue pour gagner sans eux et leur offrir la victoire.
À présent il est l’heure que , de part et d’autre , la peur de Dieu habite les acteurs politiques et les citoyens, car tout reste vanité.
Chacun de nous peut cesser de vivre d’un instant à l’autre, et aucun de nos leaders n’est immortel.
Houphouet est bien mort. Quelle que soit leur longévité politique et l’espérance de vie, Bédié, Ouattara, Gbagbo, Banny et d’autres acteurs politiques de premier plan s’en iront bien un jour lointain. Cela devrait suffire à nous rendre plus humble, moins orgueilleux, plus sage et plus humain.
Bon vote à ceux qui iront voter , et bon boycott “par tous les moyens légaux” à ceux qui veulent s’abstenir.
Charles Kouassi