La croissance du commerce maritime a mis en avant le rôle stratégique des infrastructures portuaires, qui occupent une place primordiale dans le développement économique et commercial des États maritimes. Le contrôle de ces infrastructures selon notre expert en transport maritime international Sékou CAMARA confère un avantage économique et stratégique. La plupart des grands opérateurs actifs dans ce domaine, croit savoir Sékou CAMARA, sont originaires de France, d’Allemagne, de Belgique, d’Arabie saoudite, de Turquie, de Chine, ou encore des Émirats Arabes Unis. Ici l’influence de la Chine dans le commerce maritime révélé par notre expert.
L’exemple de la Chine illustre bien cela. En effet, les entreprises chinoises, notamment dans le cadre de la stratégie des nouvelles routes de la soie, possèdent ou exploitent des terminaux dans près de 96 ports dans 53 pays. Aux États Unis, les ports concernés comprennent ceux de Miami, Houston, Los Angeles et Seattle. L’armateur COSCO et son concurrent China Merchants Port (CMP) possèdent déjà des terminaux ou des parts dans des opérateurs portuaires au sein de 14 ports européens. Le port du Pirée, en Grèce, en fait partie.
Près de 10 % du trafic maritime de marchandises de l’UE serait sous contrôle chinois.
En 2016, affecté par la crise et sous pression de ses créanciers, le gouvernement grec donne son feu vert à la privatisation du Pirée. COSCO en devient l’actionnaire majoritaire (la société détient aujourd’hui 67% du capital) et l’autorité portuaire passe sous pavillon chinois. L’armateur s’attelle à dynamiser l’activité du port européen (5,6 millions de conteneurs en 2020, contre 900 000 en 2010).
COSCO et CMP ont également fait l’acquisition d’une partie du port d’Anvers (25%) ou des terminaux à conteneurs de Zeebrugge (90%) et de Rotterdam (35%). Au total, c’est près de 10 % du trafic maritime de marchandises de l’UE qui serait sous contrôle chinois. Les investissements chinois dans les ports européens renforcent la domination de la Chine sur le secteur du fret. Ceux-ci pourraient influer sur les relations des États concernés avec Pékin, tout en influençant le transit des marchandises (par quels ports celles-ci transitent-elles, via quels navires sont-elles acheminées).
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En outre, un cap supplémentaire a été franchi en novembre 2022, lorsque le gouvernement allemand a autorisé COSCO à racheter une partie du capital du terminal à conteneurs du port de Hambourg, troisième port européen. Soutenue par le chancelier Olaf Scholz (par ailleurs ancien maire de Hambourg), l’opération a été très décriée par l’UE et une partie de l’exécutif allemand. L’armateur chinois n’a finalement pris le contrôle que de 24,9% du terminal, au lieu des 35% initialement prévus.
Philippe Kouhon