A Abidjan quelques pro-Ouattara soutenaient Blaise Compaoré, et sans doute le pouvoir d’Abidjan également. Toutefois, tous les partisans du régime d’Abidjan ne soutenaient pas Compaoré. L’attitude des « pro-Ouattara anti-Compaoré », a même suscité l’ire de certains pro-Ouattara et proches du régime sur le danger de la chute de l’homme fort de Ouaga. Au sein même du pouvoir d’Abidjan, des ministres et des décideurs disaient depuis peu, avoir attiré l’attention du désormais ex-Président du Faso sur les dangers à venir, en cas de tentative de modification de la Constitution, en son article 37 pour permettre une nouvelle candidature du président sortant.
Certains des amis d’Abidjan de Blaise Compaoré, citant des confidences de Boureïma Badini, lui ont même rappelé son refus il y’a dix ans de mentionner à 3 la limite du mandat présidentiel. Malgré l’insistance à l’époque de Boureïma Badini, à l’époque ministre de la justice avant de devenir médiateur de la crise ivoirienne, (et d’être éloigné de ce fait du pouvoir parce qu’il a été porteur d’un projet déjà controversé à l’époque), Compaoré avait fait le choix de deux mandats, au lieu de trois.
A cette époque, il pensait vraiment partir en 2015, avant de se laisser à nouveau abuser par les siens. Les amis de Compaoré lui ont rappelé ces engagements-là, mais sous l’influence de son frère François, qui aura été parmi les premiers à tenter de fuir, Blaise Compaoré est revenu sur sa parole, et sur son engagement, refusant de prendre la mesure de l’ampleur de la colère du peuple. Les messages des mutineries de ces dernières années , ainsi que les départs des ténors de son parti ( Roch Mach, Ablasé, Simon Compaoré, et Salif Diallo) et d’autres moins connus, qui avaient chacun à leur niveau , des relais dans l’Armée et dans les forces de sécurité, et qui avaient aidé à construire son système, n’ont pas pu être perçus.
Au contraire, ces défections ont conduit à aveugler davantage l’ex président burkinabè, et à lui faire endosser la révolte des siens contre un sentiment de trahison et de révolte, de la part d’anciens compagnons de route. Revenons à Abidjan pour nous demander ceci : si tous les pro-Ouattara n’ont pas été favorables au maintien de Compaoré au delà de 2015 par la modification de la Constitution au Faso , peut-on en retour affirmer que tous les pro-Gbagbo ont été favorables au départ de Compaoré, étant entendu que ce départ, entre autre chose, révèle bien la force du peuple aux mains nues face aux armes.
Comme Laurent Gbagbo, Blaise Compaoré était au pouvoir. Les deux n’ont pas eu la même réaction devant la contestation de leur peuple. Et puis par exemple, les partisans de Blaise Compaoré qui sont bien nombreux, après 27 ans de pouvoir, et qui pourraient subir des exactions, comme les partisans de Laurent Gbagbo, ces pro-Compaoré qui subissent déjà des pillages dans cet Ouaga livré à la rue, et qui peuvent redouter la justice des vainqueurs, ne seront-ils pas logés au même sort que les pro-Gbagbo, avec l’exil, et la traque du nouveau pouvoir ? Ces pro-Compaoré, peuvent-ils revendiquer eux aussi, le retour de Compaoré et le « présenter comme l’épicentre, et l’épine dorsale de la réconciliation et de la paix », selon les bons mots de Sangaré Aboudrahamane ? Doivent-ils par exemple, comme des pro-Gbagbo tentent de le faire en Côte d’Ivoire, réélire prochainement Blaise Compaoré, à la tête de son parti, le CDP ? Des questions, des questions, oui des questions, qui montrent que les malheurs des uns, ne font pas toujours les bonheurs des autres ! Puissent pro-Ouattara et pro-Gbagbo aussi bien en Côte d’Ivoire, qu’ailleurs, tirer les bonnes leçons et saisir les meilleurs enseignements de ce qui s’est passé au Burkina Faso, pour la normalisation de la vie politique dans leur pays et pour les échéances électorales à venir !
Charles Kouassi, à Abidjan