Depuis plusieurs années les autorités ivoiriennes tentent de dynamiser une industrie du coton cruciale pour l’économie du pays, mais de plus en plus menacée par la concurrence internationale. Retour sur les secousses d’une filière sous pression.
La filière du coton va mieux. Les 1er, 2 et 3 février dernier, se tenait à Bouaké, au centre de la Côte d’Ivoire un vaste atelier de travail rassemblant les professionnels de l’industrie du coton. Réunis autour de la publication d’une étude réalisée par l’Organisation Interprofessionnelle Agricole de la filière coton de Côte d’Ivoire (Intercoton), les différents acteurs de la filière ont travaillé sur l’avenir de cette industrie qui constitue une grande partie des emplois ruraux au centre et au nord du pays.
Le Rapport de la Banque Mondiale montre que ce redressement de la production de coton hisse le pays à la 4ème place des pays africains producteurs de coton. L’économie ivoirienne s’est redressée en 2017, avec une croissance d’environ 7,6%, tous secteur confondus. Le Rapport de la Banque Mondiale sur la situation économique ivoirienne, intitulé “Aux portes du Paradis” de Janvier 2018 met d’ailleurs en avant la performance des politiques économiques. La production est repartie à la hausse, avec une augmentation de 5,3% en Côte d’Ivoire. Les acteurs présents début février à l’atelier de Bouaké se sont félicités de ces bons résultats et ont souhaité continuer dans cette lignée en annonçant un vaste plan visant à « améliorer les conditions de travail et de vie de tous les acteurs ». « Si le revenu du producteur augmente, expliquait Jean-Baptiste Silué, secrétaire exécutif d’Intercoton, cela va l’encourager à regagner la route de son champ (…) Tous les acteurs vont vivre de la croissance et de la productivité du coton ».
Le gouvernement ivoirien au chevet de la filière
La reprise de la filière n’était pas gagnée. Si le gouvernement maintient les incitations économiques dans ce secteur, c’est que les enjeux sont importants. Une raréfaction des terres combinée à une hausse de la demande en fait un secteur stratégique. La filière coton est une source importante de revenus pour les agriculteurs. Elle permet une entrée de devises et elle constitue les fondements de l’activité économique dans les bassins de production. En outre, le coton constitue un coproduit. Ainsi il est à la fois utilisé pour une fabrication humaine mais il sert aussi dans le cadre de l’élevage animal. La filière coton est en crise depuis près de trente ans, en partie en raison des aléas du marché mondial. Pour y remédier, les principaux pays producteurs d’Afrique de l’Ouest se sont regroupés dès 1998.
La Côte d’Ivoire, Bénin, Burkina Faso, Mali, Sénégal, Togo formaient ainsi le PR-Pica (Programme Régional de Protection Intégrée du Cotonnier en Afrique). L’organisation se fixe alors plusieurs objectifs pour le développement économique de la filière. Il met en place des programmes de recherche scientifique, l’un visant à combattre les insectes ravageurs qui prolifèrent dans les champs de coton, et l’autre à préserver la fertilité des sols. Malgré la mise en place de ces synergies, le secteur demeure soumis à quelques aléas que la volonté politique continue d’enrayer. Par exemple, pour faire face aux baisses de production, le gouvernement ivoirien prend régulièrement des mesures pour l’encourager. La météo étant parfois capricieuse, les producteurs peuvent compter sur des politiques économiques incitatives. Parmi elles, la garantie des prix pour les producteurs, à hauteur de 60% du prix CAF (Coût assurance fret), instaurée depuis 2016. Une mesure dont seuls les producteurs de café et cacao bénéficiaient jusqu’alors en Côte d’Ivoire.
L’or blanc semble tout de même reprendre de la vigueur. Le Mali enregistrait pour sa part une croissance record en 2017, détrônant le Burkina-Faso. Des signes annonciateurs d’un renouveau de la filière.
Bruno Cospain